28.5.06

Imbécilité politique

M. le président. La parole est à M. Jean-Christophe Lagarde.

M. Jean-Christophe Lagarde. J’entends bien, monsieur le ministre : obtenir la nationalité française est un acte de volonté. C’est comme cela que la France s’est construite. Mais ce constat ne suffit pas. Aujourd’hui, la naturalisation est un véritable parcours du combattant. En Seine-Saint-Denis, pour retirer un dossier, il y a déjà une file d’attente de quatre à cinq heures et il faut arriver tôt le matin, avant quatre heures. Ensuite, pour déposer ce dossier, la préfecture donne aujourd’hui des rendez-vous pour septembre 2007 ! Quelqu’un qui a envie de devenir français devrait pouvoir l’être dans des délais bien plus raisonnables quand il est installé durablement sur notre territoire. Je ne pense pas que cela serait une lourde charge administrative que de délivrer en préfecture une simple feuille permettant de déclencher la procédure. Après cinq passages à la préfecture, un an et demi d’attente et un dépôt souvent refusé sous prétexte qu’il manque un document qui n’avait pas été demandé au départ, certains se découragent.

Je sais, monsieur le ministre, que cet amendement a un caractère plus réglementaire que législatif, mais le Gouvernement devrait autoriser l’information de ceux qui renouvellent leur titre de séjour. Nous devons considérer les étrangers que nous accueillons non comme de simples travailleurs mais, s’ils le souhaitent, comme de futurs Français.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. le ministre délégué à l’aménagement du territoire. Tout cela est affaire de conviction. Monsieur Lagarde, la France n’est pas un supermarché. Certes, il y a la queue devant certains bureaux administratifs. Qu’il faille moderniser le service public pour qu’il soit plus efficace, j’en conviens. Si, au bout de plusieurs années de résidence dans notre pays, on a au fond de soi-même cette vraie volonté de devenir français, on n’abandonne pas sous prétexte qu’il faut faire quatre heures de queue. Qu’est-ce que c’est que quatre heures pour devenir français ?

M. Jean-Christophe Lagarde. Quatre heures d’attente pour quatre ans et demi de recours administratif !

M. le ministre délégué à l’aménagement du territoire. C’est vraiment un problème de conviction, monsieur Lagarde. Mes grands-parents italiens, qui se sont installés à Nice au début du siècle dernier, ont attendu trente ans, tant pour eux-mêmes que pour leurs enfants nés italiens à Nice, avant de devenir français. Pendant toutes ces années, ils ont dû démontrer leur volonté de s’intégrer, de parler couramment le français, de travailler, de créer un patrimoine, d’envoyer leurs enfants à l’école et de s’occuper de leur éducation. Le jour où ils ont obtenu la naturalisation, ils savaient qu’ils l’avaient méritée. Ils étaient fiers qu’eux-mêmes et leurs enfants soient devenus français.

Qu’est-ce que quatre heures, comparées à un tel délai ? En ce début du XXIe siècle, où l’on relance les gens pour les inciter à devenir français, il faut tout de même vérifier, si l’on veut qu’il y ait encore des repères dans notre pays, que les intéressés aient au fond d’eux-mêmes une véritable volonté d’appartenir à notre grande et belle nation. C’est une question de conviction, je le répète. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

C'est ici : http://www.assemblee-nationale.fr/12/cri/2005-2006/20060216.asp

Pour mémoire, le ministre délégué à l’aménagement du territoire s'appelle M. Christian Estrosi. Retenez son nom !