14.11.06

Présentation du projet de l'UMP pour 2007 (1)

François Fillon, conseiller politique en charge du projet, a présenté aujourd'hui le projet UMP pour 2007, année électorale.

Je commence mes commentaires par le 6ème engagement, qui parle de la "valeur travail".
Notre 6ème engagement, c'est la valorisation du travail

Notre objectif, c'est le plein emploi. C'est un espoir possible dès lors que s'impose l'éloge du travail et du mérite et que nous sommes décidés à agir fortement et différemment.
L'éloge du travail ? Tout un poème...

Quelles sont nos propositions ?
Entrons dans le vif du sujet.
Pour augmenter notre compétitivité et le pouvoir d'achat des français, nous voulons offrir aux salariés du privé comme aux fonctionnaires le droit et le pouvoir de travailler plus pour gagner plus. Toute heure supplémentaire et toute RTT convertie en temps de travail seront exonérées de charges sociales et d’impôt sur le revenu car nous voulons créer un choc immédiat en faveur des revenus du travail.
Cà commence bien. Exonérations de charges sur les heures sups et même exonération d'IR. A noter que la suppression de la taxation des revenus des heures sups est nouvelle et semble venir équilibrer le cadeau fait aux entreprises des heures sups gratuites.

Toutefois, il a déjà été dit souvent, ici et ailleurs, que ce ne sont pas les salariés qui choisissent de faire des heures sups ou pas. Elles leur sont imposées, sans possibilité de les refuser, sauf peut-être dans le public (je pense aux profs, qui peuvent refuser au-delà de 2 heures sups). D'autre part, les heures sups sont actuellement payées plus chers que les heures normales. Cela restera t'il le cas ?

Il faut donc une bonne dose de culot pour présenter les choses sous cet angle positif.
Pour donner plus de fluidité au marché de l'emploi, nous proposons de mettre en place un nouveau contrat de travail à durée indéterminée qui sera plus souple pour les entreprises, car la période d'essai sera plus longue, et plus sécurisant pour les salariés car leurs droits augmenteront avec le temps.
Encore une proposition sympathique. CPE pour tous pour plus de fluidité. L'UMP se souvient-elle que la durée de la période d'essai doit être proportionnée et qu'une décision judiciaire a déjà indiqué qu'une période d'essai de 2 ans contredit le droit européen ?

D'autre part, il est amusant de constater que ce contrat serait plus sécurisant. Il n'y a qu'à se référer à mes nombreux billets sur le CPE pour comprendre qu'il n'y a rien de sécurisant à voir sa période d'essai allongée, avec le corrolaire qu'il n'y a pas de motif à donner pour licencier.
Pour assurer la sécurité et la motivation des demandeurs d'emploi, nous suggérons de fusionner l'ANPE et l'UNEDIC et nous proposons surtout "l'assurance salaire et retour à l'emploi" qui permettra au chômeur de conserver l’essentiel de sa rémunération sous la condition de respecter des exigences de formation et les offres d'emploi correspondantes. Ce dispositif original fera l'objet d'une négociation approfondie avec les partenaires sociaux.
Fusionner l'ANPE et l'UNEDIC, pourquoi pas ? La division entre ceux qui aident à trouver un emploi et ceux qui payent est assez difficile à comprendre.

Pour le reste, le PARE (Plan d'Aide au Retour à l'Emploi) permet déjà d'appliquer des conditions de formation et de réponses à des offres sous peine de radiation. Rien d'original là-dedans, si ce n'est qu'on peut comprendre qu'il s'agira de mettre encore plus de pression sur les feignasses de chômeurs.
Pour marquer la différence entre les revenus du travail et ceux de l'assistance, les aides locales ( cantines, transport, logement…) seraient attribuées sous condition de ressources et non sous condition de statut car la famille qui se lève tôt le matin pour aller "bosser" ne doit pas avoir le sentiment d'être lésée par celle qui, cumulant les aides et allocations, n'en ressent plus la nécessité.
Tiens, d'ailleurs, les voilà les feignasses d'assistés qui ne "ressentent plus le besoin" de se lever pour aller bosser. C'est vrai que le niveau des aides sociales est tellement élevé en France qu'on comprend que des familles entières choisissent de sortir du monde du travail pour vivre des rentes fournies par l'Etat sans contrôle et pour une durée illimitée... Ce serait marrant si c'était un sketch...
Pour booster nos PME qui constituent le vivier de nos emplois, nous proposons d'expérimenter pendant deux ans une suspension des seuils qui actuellement dissuade (sic ! les seuils qui dissuadent ?) bien des entreprises de s'agrandir et nous suggérons de leur réserver une partie des marchés publics.
Réserver des marchés aux PME ? L'UMP demande donc que Bouygues, Alstom, Veolia et consorts regardent leurs fournisseurs leur manger leurs marchés ? A moins que ces mêmes groupes envoient dans les marchés réservés aux PME une ou plusieurs de leurs filiales ? Bref, en plus d'aller à l'encontre de la concurrence libre et non faussée prônée par ailleurs, cette mesure n'empêchera pas les conglomérats de capter ces marchés. Inutile et démago, cette proposition vise avant tout à séduire l'électorat des très nombreux entrepreneurs de TPE et PME.

Je note aussi la volonté de faire jeune en utilisant le terme "booster", qui est curieux dans la bouche d'un ministre issu du même parti que Jacques Toubon, célèbre pour sa loi sur la protection de la langue française. Rappel : "booster" peut avantageusement être remplacé par aider, soutenir, favoriser, assister, conforter, défendre, donner la main, encourager, épauler, étayer, favoriser, fortifier, guider, lancer, pousser, conforter, renforcer, soutenir...
Toutes ces mesures pour revaloriser le travail nécessitent une véritable réconciliation des Français avec leurs entreprises. Pour nous, l’association du capital et du travail n’a pas pris une ride, et c'est pourquoi nous voulons créer un dispositif incitatif pour les entreprises de moins de 50 salariés pour qu’elles mettent en place, elles aussi, un régime de participation. Celle ci constitue un partage du profit au même titre que les dividendes. Il n’est donc pas normal que, contrairement à eux, elle soit bloquée. Nous supprimerons donc la condition de blocage de la participation et procéderons à un déblocage progressif du capital des Français actuellement stérilisé. Cela représente près de 25 milliards d’euros mobilisables en faveur du pouvoir d’achat.
La participation est bloquée pour 5 ans, et peut-être pour 3 ans suite à une loi du début de l'année dont je n'arrive pas à retrouver la trace. A noter que cette suppression de tout délai a été abandonnée par l'UMP lors de la discussion récente de cette loi. Pourquoi donc la remettre sur le tapis ?

Sur le fond, il faudrait rappeler ici pourquoi la participation est bloquée.

Stérilisée ? Cela ne manque pas de style, mais les sommes allouées à la participation et bloquées ne sont pas stériles ! Elles travaillent, puisqu'elles sont investies et gérées sans risques (SICAV le plus souvent) . Ces sommes servent donc à l'investissement.
Au nom de l'éthique et de la confiance économique, nous proposons d'encadrer les conditions dans lesquelles les dirigeants d’entreprises peuvent bénéficier de « retraites chapeau » ou de « golden parachutes ». Quant à l’attribution de stock options, elle devra être couplée à l’ouverture de plans d’actionnariat au bénéfice des salariés.
Un peu de démagogie encore : encadrer les bonus faramineux des dirigeants.
Et stocks options pour tous. Plutôt que de rémunérer les heures sups, les salariés attendront de pouvoir exercer leurs options, qu'on leur aura distribuées pour que les dirigeants puissent en obtenir des milliers de fois plus.
L'UMP, mesdames et messieurs, veut la société du plein emploi, et il l'entend là stimuler à travers une stratégie de croissance fondée :

- sur une fiscalité maîtrisée, pesant moins sur le travail, mais également, à moyen terme, pesant moins sur les entreprises ( notamment à travers la suppression de l'imposition forfaitaire annuelle et la réforme de la taxe professionnelle ) ;

- sur un investissement public réenclenché et mieux ciblé, à l'exemple des pôles de compétitivité ;

- sur un Etat modernisé, maîtrisant ses dépenses et rationalisant le remplacement des fonctionnaires partant à la retraite, les économies dégagées devant être affectées, pour partie, à la réduction des déficits ;

- et enfin sur une action en faveur du pouvoir d'achat. Il faut agir sur le coût du logement en poursuivant l'effort actuel de construction, en modulant les aides au logement en fonction des loyers réellement versés par les ménages et en engageant une large politique d’accès à la propriété. Il faut également agir sur le prix des biens de consommation en poursuivant la réduction des marges arrière et la déconcentration du secteur de la grande distribution.
En résumé :
- moins de rentrées fiscales,
- moins de dépenses publiques,
- moins de fonctionnaires,
- pour moins de dette,
- et plus de pouvoir d'achat.

Quant à la question des salaires nous préconisons deux actions principales :

- celle, je l'ai dit, sur les heures supplémentaires. Je rappelle que quatre heures de travail supplémentaires, rémunérées 10% de plus et exonérées de charges sociales et fiscales, c’est 15% de salaire net en plus immédiatement ;

- celle de l'élargissement de la grille des rémunérations, notamment en réservant les allègements de charges aux branches qui actualisent la grille de leurs salaires.

Alors, sortons la calculette.
35 heures font un salaire S.
4 heures sups, çà fait 39 heures, payées 10% de plus par heure, çà fait 4,4 heures, donc 39,4 heures, soit un salaire de 39,4/35*S = 1,126 S. Donc augmentation de 12,6 % en salaire brut.