20.6.08

HADOPI : DADVSI III, la revanche

La gouvernement a déposé le projet de loi HADOPI (créant la Haute Autorité pour la Diffusion des Oeuvres et la Protection des droits sur Internet).

L'exposé des motifs concentre l'esentiel des clichés relatifs au téléchargement, et répète les mêmes arguments que la loi DADVSI (et DADVSI II). A croire que les difficultés rencontrées par RDDV il y a quoi ? deux ans ? sont déjà oubliées... Heureusement, les blogs ont une mémoire.

J'avais personnellement beaucoup pesté sur la loi DADVSI à l'époque, et je ne peux que constater qu'elle n'a jamais été mise en application, ce qui m'a fait perdre beaucoup d'énergie pour pas grand chose.

Aujourd'hui, l'ouvrage revient sur le métier, pour répéter les mêmes idées fausse.

Je ne résiste pas à vous livrer le début de l'exposé des motifs de la loi HADOPI, tel que rédigé par le gouvernement :

Mesdames, Messieurs,

Le présent projet de loi a pour ambition de faire cesser l'hémorragie des oeuvres culturelles sur internet et de créer le cadre juridique indispensable au développement de l'offre légale de musique, de films, d'oeuvres et de programmes audiovisuels, voire d'oeuvres littéraires sur les nouveaux réseaux de communication. À cet effet il crée un dispositif essentiellement pédagogique qui a vocation, en pratique, à se substituer aux poursuites pénales actuellement encourues par les internautes qui portent atteinte aux droits des créateurs.

Aujourd'hui, plus d'un Français sur deux a accès à l'internet haut débit. Bien plus qu'un phénomène de société, c'est un véritable tournant qui constitue, pour la diffusion de la culture, une chance extraordinaire, sans précédent depuis l'invention de l'imprimerie. Il est donc désormais possible de faire des réseaux numériques, au bénéfice du consommateur, un véritable outil de distribution de biens dématérialisés, notamment dans le domaine culturel. Cela ne sera toutefois possible que si les droits de propriété intellectuelle sont respectés.

Or, dans le même temps, jamais les conditions de création de ces oeuvres n'ont été aussi menacées. En 2006, un milliard de fichiers piratés d'oeuvres musicales et audiovisuelles ont été échangés en France. Ce phénomène déstabilise profondément l'économie de la création, qui repose sur des investissements de production et de promotion indispensables à l'existence même de la diversité culturelle. Ainsi, le marché du disque a baissé de près de 50 % en volume et en valeur au cours des cinq dernières années, ce qui s'est traduit par un fort impact aussi bien sur l'emploi des maisons de production que sur la création et le renouveau artistique avec la résiliation de nombreux contrats d'artistes et une baisse de 40 % du nombre de nouveaux artistes « signés » chaque année. Le cinéma et la télévision commencent à ressentir les premiers effets de ce changement des usages et le livre ne devrait pas tarder à suivre.

Au-delà de ses conséquences sur les supports physiques traditionnels, la culture du piratage constitue à ce jour un obstacle essentiel au développement de l'offre légale dans notre pays. Les ventes numériques dématérialisées de musique, de cinéma et de programmes audiovisuels - qui doivent prendre le relais des ventes de supports physiques (CD ou DVD) - y demeurent beaucoup plus faibles que dans les autres grands pays aux habitudes de consommation comparables : à peine plus de 7 % de notre marché de la musique, alors que ce taux a dépassé 20 % aux États-Unis.

Car le piratage, outre le tort qu'il fait au créateur et à l'entreprise qui le soutient, particulièrement lorsqu'il s'agit de petites sociétés de production indépendantes, dissuade l'investissement dans la distribution en faussant les termes de la concurrence.

Pourtant, la richesse de l'offre légale en ligne s'est considérablement développée au cours des dernières années. Plusieurs millions de titres musicaux, par exemple, y sont désormais disponibles. Et le coût pour le consommateur a fortement diminué, notamment grâce aux offres forfaitaires proposées par les fournisseurs d'accès à internet.

C'est donc la persistance d'un piratage massif qui demeure aujourd'hui le principal obstacle à l'essor de la distribution légale de films, de programmes de télévision ou de musique en ligne et à la juste rémunération des créateurs et des industries culturelles.

Pourtant, les sanctions de ce comportement existent, sur le fondement du délit de contrefaçon : jusqu'à 300 000 € d'amende et jusqu'à trois ans de prison. Mais elles apparaissent inadaptées, de même que la procédure judiciaire, au cas du piratage ordinaire. Celui-ci est commis sur une très grande échelle par plusieurs millions d'internautes, souvent inconscients du caractère répréhensible de leurs actes. Les ayants droit hésitent ainsi à emprunter la voie de droit qui leur est ouverte, qui pour cette raison n'est utilisée que très ponctuellement.

Il n'en demeure pas moins que l'internaute pirate peut aujourd'hui se trouver traduit devant le tribunal correctionnel. Et de telles procédures auraient vocation à se multiplier si les créateurs et les entreprises qui les soutiennent devaient constater que les pouvoirs publics renoncent à mettre en place une solution alternative, à la fois mieux proportionnée à l'enjeu et plus efficace - car praticable sur une grande échelle.

En plus de ces sanctions pénales, la loi met à la charge de l'abonné une obligation de surveillance de son accès à internet. En effet, en vertu de l'article L. 335-12 du code de la propriété intellectuelle, l'abonné doit veiller à ce que cet accès ne fasse pas l'objet d'une utilisation qui méconnaisse les droits de propriété littéraire et artistique. Toutefois, si cette disposition figure dans un chapitre du code de la propriété intellectuelle consacré aux « dispositions pénales », l'obligation qu'elle pose n'est aujourd'hui assortie d'aucune sanction.

Il faut donc sortir de cette situation, dangereuse pour les internautes et dramatique pour les industries culturelles françaises. Il en va, d'une part, de l'intérêt même des internautes, dont le comportement risque à terme de tarir les sources de la création et de la diversité culturelle. Il en va, d'autre part, du rétablissement de l'équilibre, aujourd'hui rompu en fait, entre deux droits fondamentaux : le droit de propriété des créateurs et le droit au respect de la vie privée des internautes.

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