1.3.06

Brevets en VO

Libération, encore lui, nous apprend également aujourd'hui qu'un texte vise à supprimer l'obligation de traduire les brevets dans la langue de chaque pays pour qu'ils s'y appliquent. Il suffirait désormais de le rédiger dans l'une des trois langues officielles de l'Office Européen des Brevets (OEB), à savoir l'anglais, l'allemand et le français.

Certains y voient un signe supplémentaire de l'affaiblissement de la France dans le monde, puisque des brevets rédigés en anglais ou en allemand pourraient s'appliquer en France. D'autres parlent d'un gain d'argent, puisque la traduction renchérirait le dépôt d'un brevet de 10 à 40%.

Cependant, les conséquences d'une telle décision sont grandes d'un ponit de vue économique, à défaut de l'être pour le rayonnement de la France dans le monde.

De grandes entreprises françaises ayant déjà adopté l'anglais comme langue de travail ne verront aucun problème à rédiger en anglais des brevets s'appliquant même en France. Sur ce point le combat est déjà perdu... La maîtrise de l'anglais est devenue incoutournable dans le monde de l'économie et du commerce, et une autre langue, voire plusieurs autres, sont des atouts indéniables.

Que de très grandes entreprises, souvent internationales, aient les moyens humains de lire directement dans la langue d'origine un brevet me paraît assez naturel. Mais je suis convaincu que cela posera de gros problèmes à de nombreuses PME, surtout si la langue du brevet est l'allemand. Il n'est en effet pas du tout évident de disposer de personnel dans son entreprise maîtrisant l'allemand à un niveau suffisant pour éviter les écueils de la rédaction sybilline des brevets. Les PME devront donc supporter le coût de la traduction du brevet en français.

La réduction des coûts que promettent certains est donc toute relative, et favorise encore les grandes entreprises (déposant de nombreux brevets) par rapport aux petites (déposant moins de brevets). La compensation des coûts entre le dépôt moins cher et la traduction obligatoire se fera structurellement au détriment des PME.

Sans parler des inévitables conflits qui résulteront des erreurs ou approximations de traduction, puisque le seul texte faisant foi sera celui dans la langue d'origine, alors qu'une traduction officielle du déposant du brevet en faisant de facto une version inattaquable.

Bref, encore une décision soi-disant pour réduire des coûts qui risque d'entraîner des surcoûts supplémentaires et fragiliser en particulier les PME, disposant de beaucoup moins de moyens que les grandes entreprises pour la veille technologiques des brevets.

Au final, s'il est dommage que le français soit de moins en moins parlé et enseigné dans le monde, cela demande d'autres moyens que de tenter de s'opposer à une telle décision, qui a des conséquences économiques dommageable pour le tissu économique français (93% de TPE, Très Petites Entreprises = moins de 10 salariés).

YR