6.7.06

Contrat d'accueil et d'intégration

Pendant que les veaux meuglent, les représentants du peuple, bien qu'ils n'hésitent pas à suspendre leurs travaux pour une pause de meuglement, continuent de faire leur travail, sans grande publicité de la part des médias.

Ainsi, le 30 juin dernier a été voté par les deux assemblées, le texte de loi relatif à l'immigration et l'intégration.

Ce texte contient des modifications du Code de l'Entrée et du Séjour des Etrangers et des Demandeurs d'Asile.

Parmi ces modifications, on note la création d'un contrat d'accueil et d'intégration, à l'article 4.

Article 4

I. - Dans la section 2 du chapitre Ier du titre Ier du livre III du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il est inséré un article L. 311-9 ainsi rédigé :

« Art. L. 311-9. - L'étranger admis pour la première fois au séjour en France ou qui entre régulièrement en France entre l'âge de seize ans et l'âge de dix-huit ans, et qui souhaite s'y maintenir durablement, prépare son intégration républicaine dans la société française.

« À cette fin, il conclut avec l'État un contrat d'accueil et d'intégration, traduit dans une langue qu'il comprend, par lequel il s'oblige à suivre une formation civique et, lorsque le besoin en est établi, linguistique. La formation civique comporte une présentation des institutions françaises et des valeurs de la République, notamment l'égalité entre les hommes et les femmes et la laïcité. La formation linguistique est sanctionnée par un titre ou un diplôme reconnus par l'État. L'étranger bénéficie d'une session d'information sur la vie en France et, le cas échéant, d'un bilan de compétences professionnelles. Toutes ces formations et prestations sont dispensées gratuitement. Lorsque l'étranger est âgé de seize à dix-huit ans, le contrat d'accueil et d'intégration doit être cosigné par son représentant légal régulièrement admis au séjour en France.

« Lors du premier renouvellement de la carte de séjour, il peut être tenu compte du non-respect, manifesté par une volonté caractérisée, par l'étranger, des stipulations du contrat d'accueil et d'intégration.

« L'étranger ayant effectué sa scolarité dans un établissement d'enseignement secondaire français à l'étranger pendant au moins trois ans est dispensé de la signature de ce contrat.

« L'étranger qui n'a pas conclu un contrat d'accueil et d'intégration lorsqu'il a été admis pour la première fois au séjour en France peut demander à signer un tel contrat.

« Un décret en Conseil d'État fixe les conditions d'application du présent article. Il détermine la durée du contrat d'accueil et d'intégration et ses conditions de renouvellement, les actions prévues par le contrat et les conditions de suivi et de validation de ces actions, dont la reconnaissance de l'acquisition d'un niveau satisfaisant de maîtrise de la langue française et la remise à l'étranger d'un document permettant de s'assurer de l'assiduité de celui-ci aux formations qui lui sont dispensées. »

II. - L'article L. 117-1 du code de l'action sociale et des familles est ainsi rédigé :

« Art. L. 117-1. - Les règles relatives au contrat d'accueil et d'intégration sont fixées à l'article L. 311-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. »

Rappelons que le législateur, donc le Gouvernement de M. Villepin en l'espèce, et le ministre de l'Intérieur en particulier, motivent cet article de la façon suivante :

Le Gouvernement entend promouvoir, dans ce cadre, une immigration choisie. C'est l'objet du titre Ier du projet de loi.

Le chapitre Ier énonce les dispositions générales relatives à l'entrée et au séjour des étrangers en France.

L'article 4 généralise le contrat d'accueil et d'intégration, qui doit être signé par tout étranger admis pour la première fois au séjour en France et qui souhaite s'y maintenir durablement.

Défini dans un nouvel article du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (L. 311-7), le contrat, qui engage l'État et l'étranger signataire, constitue la première étape de l'intégration de l'étranger à la société française. L'étranger recevra une formation civique, comportant une présentation des institutions et des valeurs de la République, dont l'égalité entre les hommes et les femmes. Il bénéficiera également d'une formation linguistique et, le cas échéant, d'un bilan de compétences professionnelles.

En outre, l'article L. 117-1 du code de l'action sociale et des familles établit un lien entre le dispositif d'action sociale et le droit du séjour, en renvoyant la définition du contrat d'accueil et d'intégration au code de l'entrée et du séjour des étrangers.

Ceci étant rappelé, prenons maintenant le temps de discuter un peu.
L'étranger admis pour la première fois au séjour en France ou qui entre régulièrement en France entre l'âge de seize ans et l'âge de dix-huit ans, et qui souhaite s'y maintenir durablement, prépare son intégration républicaine dans la société française.
Sont concernés par cet article les étrangers :
  1. qui souhaitent se maintenir en France durablement,
  2. qui arrivent en France pour la 1ère fois,
  3. ou qui ont entre 16 ans et 18 ans ;
  4. qui n'ont pas effectué 3 ans de scolarité dans un lycée français à l'étranger.
Mais comment se définit "durablement" ? Faut-il exprimer le souhait de mourir en France ? Faut-il simplement être contraint par une raison quelconque de devoir séjourner plus de 3 mois (durée du visa de tourisme) en France, même si on ne souhaite pas y rester à vie ? Cela concerne t'il les étrangers qui viendraient en France pour travailler quelques années avant de repartir dans leur pays où leur vie se trouve (prenons le cas de japonais, par exemple) ?

Dès le premier alinea, on est donc dans le flou : impossible de savoir qui est vraiment concerné par cette mesure et qui devra (car c'est la loi, donc c'est une obligation) signer ce contrat ? La voonté du législateur n'est pas claire : l'étranger entrant en France devra t'il systématiquement signer ce contrat ; devra t'il s'engager sur une durée de séjour pour ne pas le signer ; pourquoi un mineur entre 16 et 18 ans serait-il contraint à ce contrat, s'il ne souhaite pas rester au-delà de sa majorité ?

Passons sur le fait que dans la pratique, les lycées d'enseignement français à l'étranger sont réservés aux rejetons de la classe dirigeante du pays dans lequel est installé cet établissement... L'immigration choisie est clairement affirmée par ce simple détail.

Par contre, il est clair que dans le cas où tout étranger arrivant sur le sol français et autorisé à y séjourner plus de 3 mois pourrait en pratique se voir contraint de s'engager sur ce contrat, quand bien même il ne souhaite pas rester "durablement" sur le territoire français, ce qui permettra aux autorités françaises de mettre un grand nombre de conditions à son séjour.

Car "lors du premier renouvellement du titre de séjour", les actions des étrangers sous contrat seront passés au crible de ses obligations contractuelles pour délivrer un nouveau titre. Que cet étranger souhaite rester "durablement" ou pas. Si son titre doit juste lui permettre de poursuivre des études avant de rentrer diplôme en poche au pays, il devra se soumettre au contrat comme l'étranger qui demande à rester 10 ans de plus.

Mais quelles sont ces conditions opposables au demandeur d'un renouvellement ?
  1. Obligation de formation civique ;
  2. Au besoin, obligation de formation linguistique ;
  3. Information sur la vie en France ;
  4. Au besoin, bilan de compétences.
Le législateur indique tout de même que ces formations et bilans seront gratuits, c'est à dire à la charge de l'Etat. Aucun chiffrage dans ce texte du coût d'une telle mesure, qu'il faudra probablement aller chercher dans la loi rectificative de finances à la fin de l'année.

Quel est l'objectif de l'Etat derrière ces obligations ? Autant la formation linguistique et l'information sur la vie en France semblent d'excellentes idées, autant la formation civique laisse un arrière-goût acide. En effet, cette formation a pour objet, dans la loi, :

la présentation des institutions françaises et des valeurs de la République, notamment l'égalité entre les hommes et les femmes et la laïcité.


Mais à qui donc le Gouvernement pense t'il s'adresser ? A des personnes qui ne connaîtraient les valeurs centenaires de la République ? D'accord. Alors pourquoi ne pas insister plutôt sur les libertés fondamentales, sur l'égalité des chances, sur la justice égale pour tous, sur la liberté du culte, sur la présomption d'innocence, sur l'école gratuite et obligatoire, sur le droit à l'accès aux soins pour tous, sur le droit à la sûreté (à savoir le droit à être protégé de l'arbitraire et non pas un droit supposé à ne pas être aggressé dans la rue)...

Pourquoi ? Parce qu'on glisserait très vite sur le fait que le droit fondamental du citoyen, à savoir le droit de vote et d'éligibilité, est associé à la nationalité ? Parce qu'il faudrait expliquer que les étrangers ont le droit de payer des impôts mais pas d'être représentés ? C'est vrai que cela serait délicat d'expliquer cette entorse aux droits fondamentaux...

D'autre part, cette rédaction permet de cerner qui sont, dans l'esprit du législateur, les "mauvais" étrangers, ceux dont il faut craindre l'arrivée sur notre sol. Ce sont ceux qui ne respectent pas chez eux les femmes et la laïcité. Caricaturons à peine pour comprendre : qui est souvent présenté comme plaçant systématiquement les femmes en-deçà des hommes et ne connaissant pas la laïcité ? Les indices convergent pour dire qu'il s'agirait de ressortissants de pays dont la majorité de la population serait de confession musulmane. Tiens donc ! Quel heureux hasard à l'heure où l'instigateur de ce texte avoue vouloir aller chercher les électeurs du FN un par un, électeurs connus pour vouloir renvoyer chez eux les hordes mahométanes...

Ceci étant dit, il n'est certes pas illégitime de vouloir doter les nouveaux entrants en France, pour peu qu'ils souhaitent de plus y rester, d'un bagage culturel minimum qui leur facilitera la vie et leur évitera de commettre certains impairs. Cela pouvait sans doute être réalisé sans passer par un "contrat" à valeur coercitive.

Sur le fond, reste également à trancher la valeur légale de ce contrat, dans le sens où il existe une très grande jurisprudence sur ce thème.

2 Commentaire(s) :

Anonymous Anonyme a écrit...

hum.. oui.. quoi dire de plus.. tellement de choses malheureusement..
les lycées français ne sont pas uniquement réservés aux rejetons de français auquel cas de toute façon cela ne favorise pas l'immigration choisie qui concerne spécifiquement les étrangers
magnifique prestation sur la notion de "durablement", mais qu'apporte-t-elle exactement de concret? les politiques d'accueil concernent les hommes et les femmes (et les enfants) qui souhaitent venir vivre en france, la mention de la durée de leur séjour ne choque que vous, d'autant que vous semblez confondre tourisme et immigration!
seuls les étrangers hors Union européenne sont totalement dépourvus de droit de vote
il est dommage que vous ayez une lecture en terme de "mauvais" et de "bons" étrangers, surtout lorsque vous associez "en caricaturant" a peine mauvais avec musulmans, n'avez-vous jamais entendu parler de la condition de la femme dans les campagnes chinoises??

4:05 PM  
Anonymous Anonyme a écrit...

outre la partialité de votre texte, je suis étonnée que vous n'ayez pas l'air de savoir (ou que vous ne fassiez pas mention) du fait que la généralisation du contrat d'accueil et d'intégration à l'ensemble du territoire a été voté et inscrit dans la loi de cohésion sociale de 2005 et pas du tout dans la nouvelle loi d'immigration et d'intégration de notre ami commun...

4:13 PM  

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