21.7.06

Machinavotés : mode d'emploi écrit en français

[EDITION DU 27 JUILLET 2006]
On trouvera ici un article très intéressant sur le sujet.

D'où il ressort qu'il n'est pas possible aux citoyens d'avoir accès aux rapports de l'APAVE concernant les machinavoté :
Puis le Ministère de l’Intérieur a demandé conseil à la CADA (Commission d’Accès aux Documents Administratifs). Celle-ci a rendu sa décision le 26 janvier 2006, refusant la communication au motif que cela violerait le “secret industriel et commercial”et “pourrait compromettre le bon déroulement des élections”.
Il est ahurissant de constater que la garantie de bon fonctionnement des machinavotés est entre les mains de leurs constructeurs, sans que les citoyens qui les utiliseront et seront les premiers concernés par les résultats qu'elles donneront, ne puissent savoir comment elles fonctionnent et comment elles sont certifiées conformes !

[/EDITION]

Suite au message précédent, voici quelques compléments législatifs., provenant du Code Electoral, et concernant les machinavotés. Mes commentaires en vert et entre crochets.

Article L57-1

(Décret nº 64-1086 du 27 octobre 1964 Journal Officiel du 28 octobre 1964)

(Loi nº 88-1262 du 30 décembre 1988 art. 3, 4 et 5 Journal Officiel du 4 janvier 1989)

(Loi nº 2004-1343 du 9 décembre 2004 art. 14 1º Journal Officiel du 10 décembre 2004)

(Loi nº 2005-102 du 11 février 2005 art. 72 Journal Officiel du 12 février 2005)

Des machines à voter peuvent [et non pas doivent] être utilisées dans les bureaux de vote des communes de plus de 3 500 habitants figurant sur une liste arrêtée dans chaque département par le représentant de l'Etat. [Il n'est pas précisé que les machinavotés doivent remplacer le vote par enveloppe]
Les machines à voter doivent être d'un modèle agréé par arrêté du ministre de l'Intérieur et satisfaire aux conditions suivantes :
- comporter un dispositif qui soustrait l'électeur aux regards pendant le vote [c'est bien la moindre des choses pour un vote à bulletins secrets, seul vote totalement respectueux de la volonté intime du citoyen, n'en déplaisent aux étudiants bloqueurs de facs adeptes du vote à main levée...];
- permettre aux électeurs handicapés de voter de façon autonome, quel que soit leur handicap ;
- permettre plusieurs élections de type différent le même jour à compter du 1er janvier 1991 ;
- permettre l'enregistrement d'un vote blanc [ceci n'est pas anodin : le vote blanc est l'expression d'une opinion];
- ne pas permettre l'enregistrement de plus d'un seul suffrage par électeur et par scrutin ;
- totaliser le nombre des votants sur un compteur qui peut être lu pendant les opérations de vote ;
- totaliser les suffrages obtenus par chaque liste ou chaque candidat ainsi que les votes blancs, sur des compteurs qui ne peuvent être lus qu'après la clôture du scrutin ;
- ne pouvoir être utilisées qu'à l'aide de deux clefs différentes, de telle manière que, pendant la durée du scrutin, l'une reste entre les mains du président du bureau de vote et l'autre entre les mains de l'assesseur tiré au sort parmi l'ensemble des assesseurs [disposition semblable à celle utilisée pour les urnes, qui ne s'ouvrent qu'avec deux clefs pour éviter des fraudes. Cette disposition est inopérante pour une machinavoté, puisque le comptage est électronique.].

[On le voit, aucune disposition n'est requise pour obliger les concepteurs de machinavotés à porter à la connaissance de tous le fonctionnement du comptage et la façon de le contrôler. De même, aucune disposition n'indique que le recomptage doit être possible, ni n'impose une sauvegarde papier des votes... Comment alors être certain que le comptage effectué est conforme, si on ignore comment il est réalisé et si on ne peut le contrôler manuellement a posteriori ?]

Article L58

Dans chaque salle de scrutin les candidats ou les mandataires de chaque liste peuvent faire déposer des bulletins de vote sur une table préparée à cet effet par les soins du maire.
Cet article n'est pas applicable dans les bureaux de vote dotés d'une machine à voter. [l'objectif étant de diminuer le coût des élections, cette disposition est logique, mais laisse penser que l'utilisation de bulletins est proscrite en cas de vote électronique... donc pas de possibilité de choix du mode opératoire pour le citoyen.]

Article L60

(Décret nº 64-1086 du 27 octobre 1964 Journal Officiel du 28 octobre 1964)

(Loi nº 88-1262 du 30 décembre 1988 art. 6 Journal Officiel du 4 janvier 1989)

Le vote a lieu sous enveloppe, obligatoirement d'une couleur différente de celle de la précédente consultation générale.
Le jour du vote, celles-ci sont mises à la disposition des électeurs dans la salle de vote.
Avant l'ouverture du scrutin, le bureau doit constater que le nombre des enveloppes correspond exactement à celui des électeurs inscrits.
Si, par suite d'un cas de force majeure, du délit prévu à l'article L. 113 ou pour toute autre cause, ces enveloppes réglementaires font défaut, le président du bureau de vote est tenu de les remplacer par d'autres d'un type uniforme, frappées du timbre de la mairie, et de procéder au scrutin conformément aux dispositions du présent code. Mention est faite de ce remplacement au procès-verbal et cinq des enveloppes dont il a été fait usage y sont annexées.

[cet article implique donc que le vote DOIT se faire sous enveloppe. Un oubli du législateur, trop pressé de permettre l'usage des machinavotés ?]

Article L62

A son entrée dans la salle du scrutin, l'électeur, après avoir fait constater son identité suivant les règles et usages établis ou après avoir fait la preuve de son droit de voter par la production d'une décision du juge du tribunal d'instance ordonnant son inscription ou d'un arrêt de la Cour de cassation annulant un jugement qui aurait prononcé sa radiation, prend, lui-même, une enveloppe. Sans quitter la salle du scrutin, il doit se rendre isolément dans la partie de la salle aménagée pour le soustraire aux regards pendant qu'il met son bulletin dans l'enveloppe; il fait ensuite constater au président qu'il n'est porteur que d'une seule enveloppe; le président le constate sans toucher l'enveloppe, que l'électeur introduit lui-même dans l'urne.
Dans chaque bureau de vote, il y a un isoloir par 300 électeurs inscrits ou par fraction.
Les isoloirs ne doivent pas être placés de façon à dissimuler au public les opérations électorales.
Dans les bureaux de vote dotés d'une machine à voter, l'électeur fait constater son identité ou fait la preuve de son droit de voter dans les conditions prévues à l'alinéa 1 et fait enregistrer son suffrage par la machine à voter. [là encore, la formulation de cet alinea implique que là où il y a machinavoté, il n'y a pas d'autre moyen de vote...]

Article L63

(Décret nº 64-1086 du 27 octobre 1964 Journal Officiel du 28 octobre 1964)

(Loi nº 88-1262 du 30 décembre 1988 art. 8 Journal Officiel du 4 janvier 1989 en vigueur le 1er janvier 1991)

L'urne électorale est transparente. Cette urne n'ayant qu'une ouverture destinée à laisser passer l'enveloppe contenant le bulletin de vote doit, avant le commencement du scrutin, avoir été fermée à deux serrures dissemblables, dont les clefs restent, l'une entre les mains du président, l'autre entre les mains d'un assesseur tiré au sort parmi l'ensemble des assesseurs.
Si, au moment de la clôture du scrutin, le président n'a pas les deux clefs à sa disposition, il prend toutes les mesures nécessaires pour procéder immédiatement à l'ouverture de l'urne.
Dans les bureaux de vote dotés d'une machine à voter, le bureau de vote s'assure publiquement, avant le commencement du scrutin, que la machine fonctionne normalement et que tous les compteurs sont à la graduation zéro.
[Cà y est, le législateur me fâche ! En quoi bon sang le fait que les compteurs soient à 0 au début du scrutin constitue-t'il une garantie suffisante que les totaux affichés en fin de scrutin seront conformes à l'expression des citoyens ? On dirait que le législateur méconnaît complètement le fonctionnement possible d'un logiciel ou d'une carte électronique ! Il est possible de fausser un résultat final extrêmement facilement, sans que la condition initiale de nullité du total soit en rien suffisante ! Une mémoire contenant le résultat final à afficher, indépendamment des boutons poussés toute la journée, un tirage aléatoire visant à favoriser une liste ou un candidat, un biais systématique pas trop voyant, etc. Le processus de qualification et de validation de bon fonctionnement d'un appareil électronique ou d'un logiciel demande des compétences plus poussées que la simple capacité à lire qu'un compteur affiche bien zéro ! Ou alors, il faut des machineries dont le fonctionnement soit validé par plusieurs techniciens indépendants et assermentés, qui soient capables de vérifier le fonctionnement intime et complet de la machine. Cela me semble particulièrement difficile sur des logiciels ou des cartes électroniques. Il faudrait alors une machine à fonctionnement mécanique, sans mémoire cachée, sans logiciel au fonctionnement secret, sans possibilité de doute... On en est loin avec ce texte indigent !

Bien entendu, je suis conscient que ce difficile travail de validation devrait être effectué quelquepart dans le processus d'agrément - peut-être au ministère de l'intérieur lors de la réception des machines ? Mais là encore, rien ne garantit que les machines finalement installées dans les bureaux de vote seront conformes à l'agrément du ministère, sauf à procéder systématiquement à un contrôle poussé des appareils, disposition qui n'est pas prévue dans ce texte.]

Article L64

(Décret nº 64-1086 du 27 octobre 1964 Journal Officiel du 28 octobre 1964)

(Loi nº 88-1262 du 30 décembre 1988 art. 9 Journal Officiel du 4 janvier 1989)

Tout électeur atteint d'infirmité certaine et le mettant dans l'impossibilité d'introduire son bulletin dans l'enveloppe et de glisser celle-ci dans l'urne ou de faire fonctionner la machine à voter est autorisé à se faire assister par un électeur de son choix.
Lorsqu'un électeur se trouve dans l'impossibilité de signer, l'émargement prévu par le troisième alinéa de l'article L. 62-1 est apposé par un électeur de son choix qui fait suivre sa signature de la mention suivante : l'électeur ne peut signer lui-même.

Article L65

(Décret nº 64-1086 du 27 octobre 1964 Journal Officiel du 28 octobre 1964)

(Loi nº 88-1262 du 30 décembre 1988 art. 10, 11 et 12 Journal Officiel du 4 janvier 1989)

Dès la clôture du scrutin, il est procédé au dénombrement des émargements. Ensuite, le dépouillement se déroule de la manière suivante : l'urne est ouverte et le nombre des enveloppes est vérifié. Si ce nombre est plus grand ou moindre que celui des émargements, il en est fait mention au procès-verbal. Le bureau désigne parmi les électeurs présents un certain nombre de scrutateurs sachant lire et écrire, lesquels se divisent par tables de quatre au moins. Si plusieurs candidats ou plusieurs listes sont en présence, il leur est permis de désigner respectivement les scrutateurs, lesquels doivent être répartis également autant que possible par chaque table de dépouillement. Le nombre de tables ne peut être supérieur au nombre d'isoloirs.
Les enveloppes contenant les bulletins sont regroupées par paquet de 100. Ces paquets sont introduits dans des enveloppes spécialement réservées à cet effet. Dès l'introduction d'un paquet de 100 bulletins, l'enveloppe est cachetée et y sont apposées les signatures du président du bureau de vote et d'au moins deux assesseurs représentant, sauf liste ou candidat unique, des listes ou des candidats différents.
A chaque table, l'un des scrutateurs extrait le bulletin de chaque enveloppe et le passe déplié à un autre scrutateur ; celui-ci le lit à haute voix ; les noms portés sur les bulletins sont relevés par deux scrutateurs au moins sur des listes préparées à cet effet. Si une enveloppe contient plusieurs bulletins, le vote est nul quand les bulletins portent des listes et des noms différents. Les bulletins multiples ne comptent que pour un seul quand ils désignent la même liste ou le même candidat.
Dans les bureaux de vote dotés d'une machine à voter, le président, à la fin des opérations de vote, rend visibles les compteurs totalisant les suffrages obtenus par chaque liste ou chaque candidat ainsi que les votes blancs, de manière à en permettre la lecture par les membres du bureau, les délégués des candidats et les électeurs présents. Le président donne lecture à haute voix des résultats qui sont aussitôt enregistrés par le secrétaire.
[Mon énervement s'intensifie, tel des frappes guerrières rapportées dans les journaux d'informations successifs. En quoi cette façon de procéder permet-elle de certifier, sans aucun soupçon possible, que les afficheurs donnent bien des chiffres représentatifs de l'expression des citoyens ? On a mis des compteurs à zéro, on a poussé des boutons, on ouvre la boîte noire et on lit des chiffres. En quoi ce processus est-il garant de la volonté du peuple ? Qui pourra prouver que la machinavoté a bien compté ? Qui pourra prouver le contraire ? Personne ! C'est une absurdité totale, qu'il convient de corriger rapidement, avant que l'ensemble des villes et villages de plus de 3500 habitants ne s'équipe de ce moyen de vote.]


Article L69

Les frais de fourniture des enveloppes, ceux qu'entraîne l'aménagement spécial prévu à l'article L. 62, ainsi que les dépenses résultant de l'acquisition, de la location et de l'entretien des machines à voter sont à la charge de l'État.
[On comprend ici quel est le seul mobile avoué de l'opération : gagner quelques euros de frais de vote... On met donc l'expression démocratique des citoyens aux mains de fabricants de gadgets électroniques pour quelques sous. C'est pathétique... et c'est dangereux pour notre démocratie, si aucun garde-fou sérieux n'est mis en place pour fiabiliser le vote par machine et le rendre aussi peu soupçonnable que le vote par enveloppe.]