30.4.08

A Roissy, la police cache au juge les conditions d'enfermement des étrangers

La politique des quotas d'explusés est-elle en cause dans cet exemple ? On peut le penser.

Cependant, ce qui stupéfie, outre les conditions déplorables de réclusion de ces personnes, c'est le mensonge éhonté de fonctionnaires de police. On attend avec intérêt de savoir ce qu'il adviendra d'eux et de leur hiérarchie.

Ainsi, non seulement la France adopte une politique répressive consistant à faire du chiffre, avec des conséquences dramatiques sur la vie des immigrés et l'encombrement de la justice avec ces affaires, mais en plus, la France qui consacre beaucoup d'argent à cette politique n'a même pas les moyens de la faire appliquer dignement (si tant est qu'il soit possible d'être digne avec une telle politique...)

Résumé :
A l'audience du 22 Avril 2008, un juge du tribunal de Bobigny s'est retrouvé confronté à deux versions divergentes ; celle de la police, et celle de deux jeunes dominicains en instance d'expulsion. Le juge a enquêté et a constaté que la police avait menti. Les conditions de rétention, à Roissy, violent les lois et les règlements en usage sur le sol français.
Bienvenue dans la France d'après.

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28.4.08

Sarkozy a fait un rêve

Bien sûr, c'est lassant.

Mais tout de même, qui peut laisser passer çà ?

"J'ai fait un rêve, c'est que les peuples de la Méditerranée du Nord et du Sud soient aussi imaginatifs et courageux que les peuples de l'Europe continentale."

C'était à Monaco, le 25 avril 2008.

Après l'homme africain incapable de se projeter dans l'Histoire, à Dakar l'an dernier, voici le temps du méditerranéen sans imagination et sans courage...

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Dans la nasse de la préfecture de Nanterre

C'est Libération qui a publié le 15 avril dernier cette terrifiante information : nous ne sommes plus en République...

Tout étranger en situation irrégulière se présentant de bonne foi à la préfecture de Nanterre (Hauts-de-Seine) risque désormais d’être arrêté et renvoyé manu militari dans son pays . Dans une note du 28 février que Libération s’est procurée, Philippe Martin, chef du bureau des étrangers, affiche ses intentions sans états d’âme : «L’éloignement des étrangers en situation irrégulière est une mission prioritaire de notre service : nous avons en ce domaine une obligation de résultat. Je vous demande donc d’appliquer avec un zèle particulier les instructions contenues dans la présente note.»

Celle-ci signale qu’«il a été décidé de procéder à l’interpellation systématique [de ces personnes ] lorsqu’elles se présentent spontanément au guichet ». Le terme «spontanément» est important. En 2006, les ministres de l’Intérieur et de la Justice ont publié une circulaire encourageant l’administration à convoquer les étrangers en situation irrégulière afin de les arrêter au guichet des préfectures. Un an plus tard, la Cour de cassation jugeait abusive l’arrestation dans ces conditions d’un Algérien.

Pour contourner cette difficulté, la préfecture de Nanterre a envoyé en ce début avril, à un certain nombre d’étrangers, un courrier que Libération s’est également procuré. «Vous m’avez saisi d’une demande de régularisation, écrit-elle. J’ai l’honneur de vous informer que les demandes de régularisation ne sont plus reçues par voie postale. Il vous appartient en conséquence de vous présenter en préfecture pour solliciter l’examen de votre situation.» Si la personne concernée se présente «spontanément», elle sera aussitôt cueillie.

Dans sa note du 28 février, l’administration détaille le modus operandi. D’abord, «se faire remettre les passeports». Puis, inviter les étrangers à prendre place dans la salle d’attente. Ensuite, «l’agent saisit le chef de la section éloignement». Celui-ci contacte à son tour la direction départementale de la sécurité publique. «L’interpellation sera réalisée en cabine fermée», conclut la note.

Selon le Réseau éducation sans frontières, quatorze sans-papiers venus «spontanément» à Nanterre ont été arrêtés en mars, quatre ont été expulsés. Reste que la justice peut également juger illégales les interpellations réalisées dans ces conditions. Hier, le juge de la détention et des libertés de Nanterre a remis en liberté un certain Monsieur Agyumand qui s’était spontanément présenté afin d’obtenir une régularisation fondée sur la modification de sa situation familiale depuis son mariage et sur son état de santé nécessitant des soins ne pouvant pas être assurés dans son pays.

Bienvenue dans la France d'après...

La France où il est "prioritaire" d'arrêter en préfecture des étrangers qu'on a informés qu'ils devaient s'y présenter...

Vous ne rêvez pas !



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25.4.08

La part de la France, par Michel Rocard

La part de la France

par Michel Rocard [débat]


lemonde du samedi 24 août 1996 (Point de vue).

LA FRANCE ne peut accueillir toute la misère du monde, mais elle doit savoir en prendre fidèlement sa part.

Prononcée par moi en 1990, la première partie de cette phrase a eu un destin imprévisible. Elle soulignait les limites inévitables que les circonstances économiques et sociales imposent à toute démarche d'immigration, et cela d'autant plus qu'on veut la conduire dignement. Ce rappel des contraintes pesant sur les responsables politiques a été perversement interprété comme un ralliement à une doctrine d'immigration zéro qui n'a jamais été la mienne et qui serait aussi irréaliste pour la France que dangereuse pour son économie.

Au point qu'aujourd'hui cette phrase, prononcée à l'époque devant les militants et amis de la Cimade, auditoire non suspect de xénophobie, est séparée de son contexte et sert de caution tous azimuts pour légitimer l'application, sans aucune considération des droits de la personne humaine, des impitoyables lois Pasqua de 1993, qui doivent être abbrogées tout comme mon gouvernement avait fait abbroger la loi Pasqua de 1986.

J'ai déjà dit souvent, et je veux écrire explicitement ici, qu'on ne peut plaider pour le tout ou rien en matière d'immigration. Que nous ne puissions, à nous seuls, prendre en charge toute la misère mondiale ne nous dispense nullement de la soulager en partie. Au contraire. Dans la fidélité à elle-même, à ses principes, à son histoire, la France doit prendre loyalement, fièrement et généreusement sa juste part de cette misère. N'est-ce pas de Gaulle, qui proclamait : « C'est beau, c'est grand, c'est généreux, la France ! » Ouvrons les yeux ! La France est la quatrième puissance économique de la planète, et quelles que soient ses difficultés actuelles, ells sont sans commune mesure avec celles de l'immense majorité du reste de l'humanité.

La France prend sa part dans la misère du monde quand elle participe au développement d'un certain nombre de pays, notamment en Afrique.

Elle prend sa part lorsque ses équipes médicales (les French doctors connus dans le monde entier) participent partout à des opérations humanitaires. Elle en prendra sa part en accédant à la demande de régularisation des ressortissants de ses anciennes colonies que sont les sans-papiers de l'église Saint-Bernard.

Combien de fois nous a-t-on répété, pour justifier les lois Pasqua, qu'il était légitime, pour obtenir la nationalité française, que les enfants nés en France fassent une démarche manifestant leur désir d'être français ? Cette argumentation ne me paraît toujours pas opposable au droit du sol. Mais ceux qui la soutiennent devraient au moins la faire jouer en faveur des Maliens de Saint-Bernard, qui témoignent d'un attachement extraordinaire à notre pays, au point que dix d'entre eux sont prêts à payer de leur vie le droit d'y demeurer.

L'histoire de la République nous oblige. La France n'est elle-même que lorsqu'elle est juste. Elle ne l'est pas quand on se laisse enfermer dans le parodoxe consistant à obéir aux injonctions de Le Pen sous prétexte de limiter son influence. Que les partis républicains réfléchissent tous ensemble à la question de l'immigration est une tâche urgente. Je l'avais engagée sans succès en 1990.Tout ce qu'il s'est produit depuis démontre qu'il est grand temps de la reprendre.

Pour l'immédiat, la première chose à faire est d'accueillir parmi nous les trois cents de Saint-Bernard. En refusant de reconnaître à temps les droits à la régularisation de ceux qui en avaient, le ministre de l'intérieur a solidarisé trois cents personnes de status juridiques très différents. Du coup, il les a rendus inséparables. Après cinq mois de lutte dans des conditions très difficiles, on doit considérer que ceux qui n'avaient pas de droits les ont, du fait même du gouvernement, acquis dans cette lutte.

L'appel au droit pour nier ce droit, le tri honteux qui nous renvoie à des souvenirs non moins honteux, sont, nous l'apprenons ce vendredi matin, les seules réponses de ce gouvernenment qui, décidément, ne sent rien, ne comprend rien. Mais cela, non plus, ne change rien : les trois cents de Saint-Bernard font aujourd'hui partie de la part qui nous revient.


Michel Rocard, ancien premier ministre, est sénateur (PS) des Yvelines.














































































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La dette, la dette, la dette

Un vieux billet d'éconoclaste pour tordre le cou à ces gens qui nous bassinent avec la dette pour des raisons politiciennes.

Premier mythe : l'endettement public est une mauvaise chose, un danger pour la "soutenabilité" des finances publiques.

Second Mythe : le chiffre du déficit public a une signification.

Troisième Mythe : le déficit public est un fardeau.

Et sa conclusion, un régal :
Mais la seconde raison est le caractère commode de la discussion sur les déficits qui permet, en s'attachant à un débat totalement dépourvu d'intérêt, de négliger les vrais problèmes posés par les finances publiques. La dépense publique est-elle utile, efficace, juste, correspond-elle à des besoins réels? L'impôt est-il simple, peu distorsif? Le système fiscal est-il juste? la redistribution fonctionne-t-elle de façon satisfaisante? N'y-at-il pas des gaspillages publics? Tous ces aspects, qui permettent de juger l'action concrète du gouvernement (car il peut agir sur ces variables-là, bien plus que sur le chômage ou sur la croissance), sont gommés par la mythologie du déficit. Et pour les gouvernements français, tout ce qui permet de dissimuler la réalité de l'action publique est bon à prendre. Sinon, les citoyens pourraient demander des comptes, ça ferait des histoires.

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Le Revenu de Solidarité Active en question

C'est la vie des idées et c'est bien.

A l'heure où des décisions sont annoncées pour financer la généralisation du RSA, il n'est pas inutile de remettre certaines pendules à l'heure.

Non, les RMIstes ne sont pas tous d'infâmes calculateurs qui préfèrent rester chez eux plutôt que d'aller bosser pour des clopinettes. L'effet d'incitation n'est pas du tout le premier facteur déterminant pour une reprise d'emploi. Mais c'est tellement plus compliqué que de dire que les RMIstes sont tous des fainéants...

Extraits :

Que constate-t-on ? Que la plus grande partie des problèmes qui font obstacle à la reprise d’emploi des bénéficiaires de minima sociaux ne sont pas d’ordre monétaire (certains travaillent en perdant de l’argent !) mais ressortissent à bien d’autres contraintes : contraintes « familiales », dues notamment à l’absence de modes de garde proposées aux allocataires de l’Allocation Parents Isolés (60% déclarent connaître des difficultés dans leur démarche de recherche d’emploi parce qu’ils et plus souvent elles ne peuvent faire garder leur enfant), contraintes de santé, contraintes de transport, absence d’accompagnement vers et dans l’emploi... En somme, il est faux d’imaginer qu’ils préfèrent ne pas travailler simplement parce que le travail ne leur rapporterait pas assez. Comme le souligne Céline Marc, ce sont moins de 1 % des bénéficiaires qui invoquent un tel manque de rentabilité financière du travail comme un obstacle au retour à l’emploi.

Cà remet les idées en place, ce genre de considérations, non ?
Il s’agit surtout aujourd’hui de mettre en place les moyens qui permettront à ces personnes de surmonter les contraintes auxquelles elles sont confrontées et qui les empêchent de retrouver un emploi. Les solutions se déduisent clairement des travaux cités ci-dessus : mettre en oeuvre un véritable service public de la petite enfance – qui devrait sans doute dans un premier temps être prioritairement consacré à résoudre les problèmes de garde des allocataires de minima sociaux puis rapidement concerner l’ensemble des parents de jeunes enfants – ; développer des postes de travail susceptibles d’accueillir les personnes présentant des problèmes de santé ; faire bénéficier les allocataires non inscrits à l’ANPE et susceptibles de travailler, des services personnalisés, et sans doute pour partie renforcés, de celle-ci, y compris de prestations lourdes de formation.
En conclusion, une question essentielle :

Les pauvres sont-ils simplement pauvres d’argent ? Ou bien le sont-ils aussi de ressources sociales, d’informations, de formation... ? En se contentant de la première position, on risque de commettre une lourde erreur.

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23.4.08

Les heures sups n'ont pas la cote

La loi TEPA (Travail Emploi Pouvoir d'Achat) de l'été dernier avait comme objectif premier de faire "travailler plus pur gagner plus".

Dispositif phare : la défiscalisation des heures sups.

Problème, le dispositif semble patauger.

C'est Libération qui le note :
Problème : le volume d’heures auxquelles ces entreprises ont eu recours est passé, lui, de 47 millions en décembre 2007 à 44 millions en janvier 2008… et 41 millions en février. Soit une baisse de 6 millions d’heures supplémentaires en France depuis décembre dernier.
Il y a bien évidemment bataille de chiffres, mais la tendance semble claire : le dispositif n'a pas entraîne, au bout de six mois de mise en oeuvre, le coup de fouet attendu.

Il se trouvera des gens pour oublier que les effets dénoncés aujourd'hui avaient été présentés los du débat sur la loi TEPA :
«Il semblerait que l’essentiel des heures supplémentaires Tepa concerne des heures qui étaient déjà faites dans les entreprises avant la loi»

«Toutes les heures supplémentaires ne sont pas déclarées par les entreprises. […] L’entrée en vigueur de [la loi Tepa] a vraisemblablement réduit ce biais de sous-déclaration.»
Ces constatations confirment les craintes : inciter les entreprises à recourir aux heures sups semble avant tout avoir conduit à un effet d'aubaine sur les heures existantes et de légalisation des heures sups non déclarées. Tout cela pour un effet nul sur l'emploi et le pouvoir d'achat, tout en creusant les caisses de 160 millions d'euros.

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22.4.08

Le retour du cas par cas

Les salariés sans papiers seront donc régularisés "au cas par cas".

Quelle délicate attention de la part du gouvernement et des préfectures !

Il serait en effet curieux que les demandes de régularisation ne soient pas traitées une par une en étudiant pour chacun les droits auxquels il peut prétendre, mais bon, acceptons que la méthode normale soit un peu différente que le "cas par cas" dont on nous rebat les oreilles ce matin.

Ce préambule pour dire quoi ?

Pour rappeler que le "cas par cas", c'était la méthode du gouvernement il n'y a pas si longtemps, à l'été 2006, pour la régularisation des familles dont les enfants étaient scolarisés. On rappellera que le ministre de l'intérieur de l'époque, un certain Nicolas Sarkozy, avait été capable de prédire le nombre de régularisations (6000 sur 30000 dossiers).

Une circulaire, celle du 13 juin 2006, précisait les critères permettant de régulariser "au cas par cas" les familles, et a conduit au final à régulariser un petit tiers des demandes effectuées.

Aujourd'hui, cette expression de "cas par cas" est ressortie pour s'appliquer aux salariés étrangers.

"Cas par cas" sonne aujourd'hui encore comme "à la tête du client". En effet, Nicolas Sarkozy ayant annoncé à l'été 2006 le nombre de régularisés avant même la fin du dépôt des demandes, il y a fort à parier que cela sera de même aujourd'hui. M. Sarkozy avait en effet considéré, à l'époque, que la politique de régularisation massive de Jospin était une erreur et que cela conduisait à dire au monde de venir en France, ce qui ne pouvait pas rentre dans une politique de maîtrise de l'immigration telle que voulue par M. Sarkozy, ministre de l'intérieur.

Aujourd'hui, régulariser les milliers de salariés concernés (selon les estimations) créerait le même appel d'air. Il y a donc fort à parier que les régularisations "au cas par cas" se feront encore selon une logique de quota.

Au cas par cas, on vous dit.

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18.4.08

Humour parlementaire

PROPOSITION DE LOI

ayant pour objet de redéfinir les contours de l’apprentissage de la conduite afin de réconcilier les usagers avec le permis de conduire.

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Vous lisez bien : pour réconcilier les usagers avec le permis de conduire !

Vous aviez remarqué que les usagers étaient fâchés avec le permis de conduire ? Qu'ils se boudaient ? Qu'il y avait un grand silence à table entre eux ?

Un grand merci à MM. Jean-Paul GARRAUD et Jean-Frédéric POISSON, pour cet éclat de rire matinal...

15.4.08

Trop de rigueur tue la rigueur

« Contrairement à l’objectif recherché, les déficits se creuseront de nouveau, compte tenu de la chute des recettes fiscales induite par la décroissance de l’économie. Trop de rigueur tuera la rigueur. La politique budgétaire restrictive française est une erreur économique à l’heure où pointe une récession mondiale. » Liêm Hoang-Ngoc est économiste, membre du conseil national du Parti Socialiste.

Par Liêm Hoang-Ngoc, Le Monde, 11 avril 2008

Le gouvernement s’apprête à appliquer un plan d’économie de 7 milliards d’euros à l’horizon 2011 dans le cadre de la révision générale des politiques publiques. Après les 23 900 départs à la retraite non remplacés en 2008 (dont 11 200 dans l’éducation), 35 000 postes seront à nouveau supprimés en 2009 dans la fonction publique. "L’économie" réalisée ne dépassera pourtant pas 500 millions d’euros par an.

On voit mal comment le gouvernement s’y prendra, sans relever les impôts, pour solder le reste de la facture par le simple biais des réorganisations annoncées (parfois nécessaires) de l’administration. En attendant, après l’éducation, l’encadrement prévu des dépenses de santé et d’emploi compromettra le traitement de nombreuses urgences sociales. Le manque de personnel dans les hôpitaux ne sera pas comblé. Le volet "sécurité" de la "flexisécurité" verra difficilement le jour. Le revenu de solidarité active ne fera pas long feu. Une telle baisse des dépenses publiques provoquera de surcroît un effet récessif.

Contrairement à l’objectif recherché, les déficits se creuseront de nouveau, compte tenu de la chute des recettes fiscales induite par la décroissance de l’économie. Trop de rigueur tuera la rigueur. La politique budgétaire restrictive française est une erreur économique à l’heure où pointe une récession mondiale. Dans un tel contexte, Américains et Britanniques ne manquent jamais d’user de l’arme budgétaire pour relancer la croissance, en complément de l’instrument monétaire. La France pourrait d’autant plus emboîter le pas que ses marges de manoeuvre budgétaires sont sous-estimées.

Premièrement, la France n’est aucunement en faillite. Comme tout compte de patrimoine, le compte de l’Etat comporte un passif, la dette, mais il inclut également les actifs qu’il détient. La différence, positive, représente 38 % du PIB. Chaque nouveau-né voit en vérité le jour avec un crédit de 11 000 euros.

Deuxièmement, nos marges de manoeuvre sont en particulier plus grandes qu’outre-Atlantique. Il existe une abondante épargne intérieure qui fait cruellement défaut aux Etats-Unis. Dans l’Hexagone, elle deviendrait excédentaire si l’Etat ne la mobilisait pas pour compenser le déficit d’investissements privés qui pénalise la croissance française. Parce que cette épargne est friande d’obligations d’Etat, réputées extrêmement sûres, l’agence France Trésor peut émettre des titres à très bas taux d’intérêt pour financer une relance budgétaire. Il n’y a donc aucun problème pour financer la politique publique. Le "paquet fiscal" a ainsi été financé grâce à la dette. Il ne provoque malheureusement pas le choc fiscal initialement escompté.

Malgré l’allégement du coût des heures supplémentaires, les entreprises n’ont aucune raison d’accroître le volume de travail dans le marasme qui prévaut. L’exonération de cotisations a donc créé un nouvel effet d’aubaine. Le manque à gagner pour la sécurité sociale devra être comblé par de nouveaux prélèvements qui pèseront sur la consommation. Le reste du "paquet" (bouclier fiscal, successions, intérêts d’emprunt...) accroît le revenu disponible des ménages aisés, dont la propension à épargner est forte.

En 2009, les 13,8 milliards du paquet fiscal pourraient être redéployés vers des dépenses porteuses d’avenir : santé, éducation, innovation, recherche, investissement public, redistribution. La dette est alors dite "soutenable" si la croissance qu’elle soutient engendre les recettes fiscales permettant en fin de course de réduire les déficits. Le meilleur moyen de réduire les déficits est de relancer la bonne dépense, celle qui exerce un effet réel sur la croissance. Entre 1999 et 2006, la Grande-Bretagne a ainsi réduit sa dette malgré un accroissement de 5 points de ses dépenses publiques, notamment destiné à créer 560 000 emplois publics, dont 150 000 dans l’éducation et 280 000 dans la santé.

Le plan de rigueur n’est justifié à l’aune d’aucun argument macroéconomique sérieux. Il n’est indispensable que dans la perspective d’un respect dogmatique du pacte de stabilité, dont Romano Prodi disait qu’il est une stupidité. L’application du pacte de stabilité est en effet à l’origine du "paradoxe de la dette" : la dette publique s’est accrue au cours de ces quinze dernières années au cours desquelles les gouvernements ont appliqué des politiques censées réduire le poids de l’interventionnisme public. Contrairement à une idée reçue, la montée inexorable des déficits n’est aucunement due à une explosion des dépenses de l’Etat et de ses dépenses de fonctionnement. La part des dépenses publiques dans le PIB est restée inchangée depuis vingt-cinq ans, autour de 53 % du revenu national.

En son sein, ce sont les dépenses sociales (santé, retraite) qui ont augmenté de plus de 2 points, sans qu’on puisse crier au scandale. La part des dépenses de l’Etat a baissé de 3 points, passant de 25 % à 22 % du PIB. Parmi celles-ci, les dépenses de fonctionnement, cibles de toutes les critiques, ont été réduites de 5 points, passant de 40 % à 35 % des dépenses de l’Etat. Les dépenses de personnel ont été réduites de 4 points, passant de 28 % à 24 % des dépenses de l’Etat. Par ailleurs, la loi organique relative à la loi de finances évalue désormais strictement chaque mission dans une perspective nécessaire de rationalisation des choix budgétaires. Enfin, les budgets des collectivités territoriales sont équilibrés, malgré de nombreux transferts de compétences réalisés sans transferts de ressources.

Le creusement de la dette publique ne provient donc pas de l’inflation de dépenses publiques, mais de la chute des recettes fiscales qui résulte de la baisse du rendement de l’impôt, induite par les réformes fiscales engagées depuis 1993, et de l’inefficacité des politiques "de l’offre". Celles-ci se sont avérées incapables d’emmener la croissance française à son taux potentiel, supérieur à 3 %.

A l’exception de la période 1998-2001, la croissance annuelle moyenne a été trop souvent en dessous des hypothèses retenues pour la construction des lois de finances. La dette publique s’est donc accrue. Elle représentait 36,5 % du PIB en 1991, avant l’entrée en application du traité de Maastricht. Elle explose entre 1993 et 1996, où elle s’élève à 58,5 % du PIB. Après un intermède lié à la reprise de 1998-2001, elle recommence à croître à partir de 2002. Elle est aujourd’hui supérieure à 64 %. Il n’y a pas d’exception française en la matière.

Malgré leur zèle à comprimer les dépenses publiques, cinq autres pays de l’Eurogroupe ne parviennent pas à respecter la limite d’un taux d’endettement de 60 % du PIB, fixé par le pacte de stabilité. Le taux d’endettement du Portugal est de 65 %, celui de l’Allemagne de 68 %, celui de la Belgique de 89 %, celui de la Grèce de 105 % et celui de l’Italie de 107 %.

La présidence française du Conseil européen peut être l’occasion, dès le 1er juillet, de lancer enfin le chantier de la révision du pacte de stabilité pour inscrire l’Europe dans la perspective d’une relance mondiale de la croissance. Puisque rien n’est gravé dans le marbre d’une Constitution, le prochain président du Conseil européen peut, pour cela, proposer sans difficulté de réviser l’article 126 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, l’un des trois textes qu’il a fait ratifier, il y a peu, par voie parlementaire.

Liêm Hoang-Ngoc est économiste, maître de conférences à l’université Paris-I.


Publication originale Le Monde

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11.4.08

L'information selon Pékin

C'est ici.

D'abord, on rit.

Puis, on réfléchit.

Et on rit moins.


Beijing, 7 avril – Le porte-parole du Centre du relais olympique du BOCOG Qu Yingpu a déclaré, le 7 avril: « Tout ce que les médias ont dit sur la soi-disant extinction forcée de la flamme olympique durant le relais à Paris est faux. Compte tenu des circonstances sur place, c'était uniquement un changement du mode de relais en vue de sauvegarder la haute dignité de la Flamme olympique. Le relais olympique à Paris s'est accompli en sécurité et selon nos plans. »

9.4.08

Le Pen a gagné la bataille des idées

On savait déjà que Le Pen avait gagné quand le candidat de l'UMP s'était senti obligé de récupérer certains thèmes du FN pour épicer son programme.

Quelques exemples ?
Création d'un ministère de l'identité nationale.
Objectifs chiffrés d'expulsions : 25000 en 2007, 26000 en 2008.
Modification des conditions d'entrée et de séjour des étrangers : immigration choisie.

Avec de tels arguments, personne ne s'étonne vraiment que le FN ait perdu ses électeurs. Les idées du FN ont plus de chance de prospérer avec l'UMP au pouvoir qu'avec le FN ostracisé...

Le problème, c'est qu'en assimilant ainsi les électeurs, les idées se sont également assimilées. La lepénisation des esprits est maintenant évidente.

Un exemple ?
Ce que Jacques Marseille écrit dans le Point et que rapporte Sébastien Fontenelle dans Bakchich.

Sous couvert de lever un tabou, Marseille cherche à chiffrer ce que coûte l'immigration à la France.

Ce faisant, loin de lever un tabou, il ne fait que reprendre ce que faisait il y a quelques années un certain Le Pen, qui accusait les immigrés de saigner la France.

Bienvenue dans la France d'après ! D'après Le Pen...

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7.4.08

Un flambeau protégé comme un chef d’Etat

C'est Libé qui nous gratifie d'un joli dessin :

Et des chiffres :
Une «bulle étanche» d’environ 200 mètres de long sera constituée autour du porteur de la flamme, véritable garde rapprochée de quelque 400 fonctionnaires, digne de la protection d’un chef d’Etat. Cette bulle sera composée de 65 motards, de 100 policiers en rollers et d’autant de pompiers de Paris joggeurs.

La voie sera ouverte par une quinzaine de motards suivis de deux colonnes de huit véhicules de la compagnie de sécurisation de la police parisienne.

Le porteur de la flamme, accompagné de quatre membres du comité olympique, sera suivi de 32 véhicules de CRS, soit 160 hommes, un groupe de motards fermant la marche. A cela s’ajouteront trois vedettes de la brigade fluviale de la préfecture de police, le tout survolé par un hélicoptère. D’autre part, la garde républicaine à cheval sera également mobilisée et 1600 policiers devraient être répartis sur le trajet pour parer à toute éventualité.

2.4.08

La France paiera pour Zoé

Et c'est le Figaro qui le prouve :



Messieurs nos gouvernants, cessez donc de nous prendre pour des imbéciles. Qui penserait que le président tchadien Déby aurait accordé cette grâce sans contrepartie ? AU-delà de ces quelques millions, on peut également penser que les aides militaires accordées au Tchad ne sont pas étrangères à cette décision. Des journalistes pour nous renseigner ? Et pas qu'au Figaro...

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1.4.08

La politique selon Fillon

Entendu François Fillon ce matin sur France Inter, juste quelques minutes lors des questions des auditeurs.

Quelques minutes instructives. De mémoire et en essayant de ne pas trahir les propos du collaborateur du président.

Sur Mittal qui licencie à Gandrange :
- l'Etat n'a pas à gérer des entreprises mais doit créer les conditions de développement de ces entreprises, suivi de l'idée que l'Etat qui gère les entreprises, c'est l'union soviétique et çà s'est mal terminé. Nous apprenons donc que l'Etat va se séparer de la totalité de ses actifs dans les entreprises publiques.
- un entrepreneur qui demande à ses salariés d'aller travailler à quelques kilomètres de chez eux sur d'autres activités c'est possible. Dans la phrase suivante les "quelques kilomètres" deviennent "quelques dizaines de kilomètres", ce qui n'est pas tout à fait la même chose en termes d'organisation personnelle des salariés.

Sur Ingrid Bétancourt :
- la France étudie toutes les possibilités, dont celle d'accueillir des FARC en France sous un statut de réfugié politique. Quand on sait la difficulté à obtenir ce statut dans la France d'après, c'est un véritable cadeau fait à des guérilléros.
- à la question de Demorand qui évoque les membres de l'Armée Rouge extardés en Italie contre la promesse française qu ileur avait été faite, Fillon parle de la différence entre la justice italienne et la justice colombienne en disant que la justice italienne est celle d'un pays européen et à ce titre respectable. Merci pour les colombiens et leur justice pas respectable...

Sur les retraites :
- les 41 ans sont incooutournables parce que "si on ne fait rien, on laisse filer la dette et nos enfants n'auront plus de retraites". Le problème actuel est plutôt que les retraités n'ont pas la retraite à laquelle ils pensaient avoir droit. Le problème actuel est plutôt que les 41 ans devaient découler d'une négociation. Ce matin, Fillon confirme que les 41 ans ne sont pas du tout négociables. Il va y avoir du sport !

Sur la politique menée :
- la politique menée est celle du président, mise en oeuvre "avec enthousiasme" par Fillon, "d'autant plus qu'il a contribué à son élaboration". Droit dans le mur, avec le sourire !

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