27.6.06

Sarkozy et les médias

Ainsi, le Ministre de l'Intérieur aurait le bras si long qu'il peut interdire la parution de la biographie (pourtant autorisée par icelle) de sa compagne et faire virer le directeur d'un hebdo ayant eu l'outrage de montrer sa compagne avec un autre homme, à un moment où semble t'il icelle ne faisait plus vie commune avec le dit ministre, ou encore influer sur les recrutements à la télévision ?

J'ai comme un doute. On nous parle des très bons rapports entretenus entre le ministre et le principal actionnaire du journal people. On nous raconte des histoires de convocation d'éditeur dans les locaux du ministère, place Beauvau. On nous rapporte des coups de téléphone entre le ministre et un patron de chaîne de télévision publique. Diantre !

J'ai un sérieux doute.

A qui profite la présentation qui est faite du ministre comme un homme capable de manipuler et d'influencer des médias d'un seul mouvement du menton ?

Je comprendrai que notre ministre puisse trouver flatteur et tirer fierté d'une telle présentation, qui lui permettrait de plus de signifier à tous, adversaires et amis politiques, électeurs, patrons de presse, que c'est LUI le patron.

Pourquoi diantre aucun journaliste, à ma connaissance, ne s'est-il encore interrogé en ces termes sur le pouvoir qu'on prête à ce membre du gouvernement et sur le rôle qu'ils jouent eux-mêmes dans la construction médiatique de l'homme politique, candidat présumé à la présidentielle ?

Mystère.

26.6.06

Proposition de loi organique visant à supprimer le cumul des mandats

C'est avec une heureuse surprise que je découvre la proposition de loi de M. Blanc (UDF) visant à supprimer le cumul des mandats.

C'est une idée que j'ai exprimée, de manière certes confidentielle, ici.

Je rejoins totalement la conclusion de son exposé des motifs et l'engage à soutenir avec la plus grande force cette proposition. Il trouvera certainement dans les rangs de la gauche et de la droite un certain nombre de députés prêts à le suivre.

Je m'étonne toutefois de l'article 1, qui permet, tel qu'il est écrit, à un citoyen d'être élu "une fois sur deux", puisque l'inégilibilité est limitée à deux mandats SUCCESSIFS. Etonnant !

Enfin, je suis surpris que cette proposition ne soit pas étendue à l'ensemble des mandats électifs, évitant ainsi les députés-maires, qu'on voit trop souvent.

Que M. Blanc sache qu'il a tout mon soutien pour "durcir" encore sa proposition, qui me paraît encore insuffisante pour "revitaliser la démocratie".

25.6.06

Repos dominical et liberté de travailler

M. Lellouche, député UMP, va déposer prochainement une proposition de loi pour l'ouverture des magasins le dimanche. Dans cette dépêche, on en apprend un peu plus sur les motivations de ce député de la droite qui s'assume :
  1. "Il faut laisser aux entreprises et aux salariés qui le désirent la possibilité de travailler le dimanche"
  2. "Plus de 70% des Parisiens voudraient pouvoir faire leurs courses le dimanche"
  3. l'ouverture dominicale des commerces "permet aussi de créer des emplois".
  4. "J'aimerais que l'on sorte de l'hypocrisie ambiante. Et que l'on rétablisse, en face du principe du repos dominical, celui au moins aussi fondamental de la liberté du travail".
Ce député, par ailleurs avocat et universitaire, reprend donc l'offensive sur le thème du travail le dimanche, offensive qui avait déjà commencée il y a plusieurs années, notamment lors de l'ouverture de la plus grande zone commerciale de France le dimanche, en contradiction avec la loi, à Plan de Campagne dans les Bouches-du-Rhône.

Je tente donc une réponse point par point au député :
1. La question du choix est comme toujours avancée par les députés de droite, selon un refrain sarkozyste bien connu. L'idée serait que les salariés doivent avoir le choix de travailler plus "s'ils le souhaitent" pour gagner plus, sous-tendant que ceux qui gagnent peu, ou pas assez à leur goût, ne le doivent qu'à leur manque de courage ou leur fainéantise...
Je vais donc rappeler à M. Lellouche que les salariés ne choisissent pas leur tâche, ni la durée de leur travail. Les salariés sont liés par un lien de subordination à leur employeur qui peut, dans la limite légale, leur faire faire ce qu'il veut quand il veut. Le thème du choix consiste donc en un choix pour l'employeur de faire bosser ses salariés quand il le souhaite. Je rappelle également à M. Lellouche qu'un refus de travailler est une faute grave, passible de renvoi. Comment dans ces conditions, laisser croire que seuls les salariés "qui le souhaitent" travaillerons le dimanche ? Mais ces subtilités de la vie des salariés peuvent, j'en conviens, échapper à une profession libérale ou à un universitaire.

2. Ainsi, les motivations exprimées dans le point 1. ne sont que poudre aux yeux. Si M. Lellouche veut permettre l'ouverture des magasins le dimanche, c'est avant tout parce que des gens souhaitent acheter ce jour-là ! Il serait intéressant que M. Lellouche aille plus loin dans son raisonnement : qui achète ce jour-là ? Ceux qui ne travaillent pas. Si ceux qui veulent acheter sont des gens susceptibles de travailler le dimanche, il n'achèteront pas. Autre question : les gens qui achètraient le dimanche achètent-ils les autres jours ? Pourquoi achèteraient-ils plus le dimanche ? Et s'ils achètent le dimanche, ils n'auront plus cet argent disponible pour acheter à un autre moment. L'idée de M. Lellouche ne serait-elle donc pas que ceux qui de toutes façons ne pourraient pas acheter aillent bosser pour que ceux qui de toutes façons ne travailleront jamais le dimanche puissent faire un peu plus de shopping ? Car dans les zones touristiques, le dimanche est déjà jour d'ouverture. Ce n'est donc pas sur des devises étrangères que M. Lellouche compte.

3. Ah ! Créer des emplois en ouvrant le dimanche, bien sûr ! Mais comment ? J'ai déjà exposé en 2. que l'argent disponible n'est pas extensible et que ceux qui achèteront le dimanche n'achèteront plus un autre jour. D'autre part, on peut penser que ce sont les employés en place qui viendront le dimanche, jour plutôt faste pour la consommation d'après M. Lellouche, pour ne pas venir les jours morts. On assiterait donc à une redistribution des horaires plutôt qu'à une augmentation du nombre d'heures travaillées. Ceci permettrait donc d'augmenter le volume de vente, sans augmenter le nombre d'heures travaillées et donc la charge. Ce qui se traduit immanquablement par des bénéfices plus élevés pour les employeurs, et des horaires encore plus embêtants pour les employés, qui, quoi qu'en dise M. Lellouche, n'auront pas le choix de travailler ou non le dimanche, avec les conséquences sociales que cela peut avoir sur l'organisation de la vie de tous les jours. Cette mesure entraîen donc une plus grande flexibilité du travail et des conditions de vie encore dégradées. Imaginons deux parents, un qui travaille le dimanche et l'autre pas, ou des parents qui travaillent le dimanche et qui doivent faire garder un gamin... Pas le genre de préoccupations d'un universitaire (4 mois de vacances, sans compter les conférences et les colloques) ou d'un avocat (profession libérale : essayez de trouver un avocat le dimanche !)

4. L'hypocrisie n'est pas celle que vous croyez, M. Lellouche. L'hypoctisie consiste à faire croire aux français que vous vous souciez de leurs conditions de vie, de leur bien-être, de leur avenir, alors que vous cédez aux pressions de la grande distribution.

Mais je vous fais peut-être un procès d'intention. On verra dans votre proposition de loi, M. Lellouche, comment le choix sera laissé aux employés, et comment seront réglés les quelques conséquences sociales prévisibles d'une ouverture des magasins le dimanche.


Je vous rappelle cependant que le Code du Travail indique clairement, dans con article 221-5 que : "Le repos hebdomadaire doit être donné le dimanche". Il me paraît donc difficile de que votre proposition ne vienne à l'encontre de cette disposition...

21.6.06

Question au Gouvernement : Responsabilités de l’état actionnaire

Lors de la deuxième séance du mardi 20 juin 2006, M. Hollande a voulu poser une question concernant la responsabilité de l'Etat auprès d'EADS, l'Etat étant actionnaire à 15%. Je recopie ici intégralement les échanges entre M. Hollande et le Premier Ministre :


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M. François Hollande – Monsieur le Premier ministre, en politique comme en tout, rien ne peut se construire sans la confiance (Interruptions sur les bancs du groupe UMP). La confiance, vous l’avez perdue auprès des Français mais aussi au sein de votre majorité (Vives exclamations sur les bancs du groupe UMP). Sinon, vous auriez d’ores et déjà privatisé Gaz de France. Et cette confiance, vous ne la retrouverez pas par le biais des actions en justice que vous intentez contre des journalistes. Jamais un Premier ministre n’avait agi ainsi sous la Vème République ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste ; vives exclamations sur les bancs du groupe UMP)

Un député UMP – Et Mitterrand ?

M. François Hollande - Pas de confiance dans le pays, pas de confiance de la majorité, ni dans la presse : dans toute démocratie digne de ce nom, le chef de l’État ou le Parlement auraient mis fin à cette situation. Mais notre pays vit actuellement sous le régime de l’irresponsabilité ! (Vives exclamations sur les bancs du groupe UMP)

Cette irresponsabilité ne doit pas gagner les affaires industrielles et économiques. Or, l’un des fleurons de l’industrie aéronautique nationale et européenne, EADS, est aujourd’hui ébranlé par le comportement de l’un de ses dirigeants. Au moment même où Airbus annonce qu’il y aura des retards dans la livraison du gros porteur A 380 et où le cours du titre EADS s’effondre de plus de 25 % en Bourse, on apprend que trois mois plus tôt, le co-président de cette entreprise a exercé son droit d’option sur ses stock-options, réalisant au passage une plus-value de 2, 5 millions d’euros. Sans préjuger des résultats des enquêtes diligentées par l’Autorité des marchés financiers, laquelle conclura ou non à un délit d’initié, cette attitude est doublement condamnable – et, je l’espère, sera condamnée ici même. Elle confirme en effet que des dirigeants d’entreprise n’hésitent pas aujourd’hui à s’octroyer des rémunérations considérables, au moment même où leurs salariés se trouvent réduits à la portion congrue (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains et sur plusieurs bancs du groupe UMP). Ces faits ont en outre eu lieu alors que le groupe EADS annonçait un millier de suppressions d’emplois dans sa filiale Sogerma de Mérignac.

M. le Président – Posez votre question, je vous prie.

M. François Hollande - Elle est très simple. Dès lors que l’État français détient 15 % du capital de EADS, dès lors que le Président de la République et vous-même, Monsieur le Premier ministre, avez joué un rôle dans la nomination du co-président d’EADS, M. Forgeard, lui maintenez-vous votre confiance ? Si tel était le cas…

M. le Président – Merci, Monsieur Hollande.

M. François Hollande - Attendez, Monsieur le Président (Huées et claquements de pupitres sur les bancs du groupe UMP).

M. le Président – Non, Monsieur Hollande. Chacun a droit au même temps pour poser sa question (Mêmes mouvements sur les bancs du groupe UMP)

M. François Hollande - Si tel était le cas, cela signifierait que l’irresponsabilité générale l’a emporté, puisqu’on aurait la preuve qu’un président d’entreprise peut se comporter ainsi sans être rappelé à l’ordre par l’État (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste ; brouhaha persistant sur les bancs du groupe UMP).

M. Dominique de Villepin, Premier ministre - Monsieur Hollande, il est des moments dans la démocratie où l’on ne peut pas dire n’importe quoi (Vives exclamations sur les bancs du groupe socialiste). En 2000, c’est vous qui avez défini, avec Lionel Jospin, le pacte d’actionnaires ; c’est votre responsabilité et nous remettrons les choses à plat (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP ; vives exclamations sur les bancs du groupe socialiste).

Il est des moments dans une démocratie où on ne peut pas mélanger les carottes et les choux-fleurs, l’exigence de vérité et l’exigence de bonne gestion. Je dénonce, Monsieur Hollande, la facilité, et je dirai même en vous regardant, la lâcheté… (Cris sur les bancs du groupe socialiste où les députés se lèvent)

M. le Président – Asseyez-vous, je vous en prie.

M. le Premier ministre - … la lâcheté de votre attitude (Les députés socialistes, empêchés de se diriger vers le Premier ministre par les huissiers, se massent au pied de la tribune où leurs cris et huées couvrent la parole du Premier ministre), sa lâcheté, je le redis. (Les députés socialistes, toujours massés au pied de la tribune, continuent de crier, « Démission ! Sortez ! » rendant quasi inaudible le propos du Premier ministre).

J’ai relevé plusieurs contradictions dans votre propos, Monsieur Hollande. Tout d’abord, vous n’avez jamais assumé la moindre politique industrielle dans notre pays. Nous, nous avons posé les bases d’une politique énergétique de pointe, au meilleur coût et respectueuse de l’environnement (Les députés socialistes continuent de crier : « Sortez ! Sortez !)

M. le Président – Arrêtez, cela ne sert à rien. Quel triste spectacle vous donnez !

M. le Premier ministre – En matière industrielle et en matière d’énergie, comme en matière politique, c’est le principe de responsabilité qui importe. (Le Premier ministre poursuit son propos, couvert par les cris des députés socialistes) Nous avons défendu les services publics alors que nous n’avez jamais cessé de les brader. Vous n’avez jamais été au rendez-vous de la politique de la nation (Le brouhaha grossit encore) alors que nous avons cherché à redéfinir les exigences, pour avancer. Enfin, alors que vous n’avez pas fait le nécessaire pour les entreprises publiques, nous voulons leur donner les moyens de se moderniser et de relever les défis (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP ; les députés socialistes, massés au pied de la tribune, continuent de crier).

M. le Président – Arrêtez ! Si vous voulez sortir, sortez, mais sortez dans le calme ! Monsieur Ayrault, montrez l’exemple. La parole est à M. Perruchot. Monsieur Cambadélis, Monsieur Dray, on se comporte correctement dans l’hémicycle ! (Intense brouhaha persistant) Monsieur Perruchot, allez-y, posez votre question (« Ce n’est pas possible ! » sur les bancs du groupe UDF).

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Que dire de ce triste spectacle ?

Cet échange est avant tout symptomatique d'une difficulté structurelle des institutions de la 5ème République. En effet, en créant une majorité par l'artifice du scrutin uninominal à deux tours par circonscription, plutôt favorable aux grosses écuries politiques, le rôle de l'Assemblée est restreint à celui d'une chambre d'enregistrement de la politique gouvernementale, pour les députés de la majorité, et à une opposition systématique de toutes façons vouée à la stérilité politique de la part de l'opposition...

C'est ainsi qu'on se provoque et qu'on s'insulte pour faire du bruit et se placer dans les médias, qui attendent complaisamment le moindre éclat de ce type. C'est désolant.

19.6.06

France Inter n'aime pas perdre de l'audience

Sur le site du Monde Diplomatique, on trouve ceci :

Sur la chronique d’Alain Rey :

« La rubrique est stoppée. Il y a une baisse de l’audience et, dans ce contexte-là, on renouvelle. [...] »

Sur l’émission produite par Daniel Mermet :

« [...] Je ne dis pas qu’il est responsable de l’audience de France Inter. Mais je vous dis : et ; et si l’équipe qui le remplace était capable de gagner 0,2 point. Eh bien, France Inter aurait gagné 0,4 point. [...]»

C'est ainsi qu'est dirigée France Inter : sur la base d'enquête d'audience...

On pourrait penser qu'une radio publique a peu à se soucier de ce critère de gestion plutôt "privé". On pourrait s'attendre à ce que le contenu des émissions diffusés soient un critère prioritaire. On pourrait s'attendre à ce qu'une radio publique, financée par la redevance, assure des missions de service public : information pluraliste, analyses détaillées, pédagogie, ouverture d'esprit.

Mais non, France Inter (et l'ensemble des chaines de Radio France) préfère se vautrer dans la médiocrité des stations privées : parler de la bourse, laisser parler des analystes politiques multicartes et monopenseurs, fermer l'antenne aux gêneurs, et surtout, surtout, garder l'oeil rivé sur les annonces Médiamétrie, nouvel haruspice du XXIème siècle !

Nous saurons bientôt quelle allure aura la grille de rentrée, et si certaines émissions de bonne tenue restent programmées, ou si elles seront sacrifiées sur l'autel de l'audience...

17.6.06

Le gouvernement refuse une seconde lecture sur le projet de loi DADVSI

Le 9 mars dernier, à l'Assemblée Nationale, le ministre de la culture déclarait :
M. le Ministre – Nous avons tout le temps de travailler, autant ici qu’ensuite au Sénat. Si une grande différence apparaît, des positions inconciliables, entre les deux chambres, le Gouvernement appréciera la situation en tout respect de la souveraineté parlementaire et décidera s’il y a lieu d’organiser des navettes supplémentaires. Notre état d’esprit est celui de l’ouverture et de la volonté de clarification (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP ; exclamations sur les bancs du groupe socialiste). Nous n’avons que trop attendu pour débattre de ces questions majeures. Nous n’en avons pas eu le courage. Nous sommes l’avant-dernier pays de l’Union à transposer la directive !
Le Gouvernement a donc décidé qu'il n'y a pas lieu de remettre le texte en lecture dans les assemblées. Une Comission Mixte Paritaire va être chargée d'harmoniser les deux textes, votés par l'Assemblée et par le Sénat.

Ce qui, si l'on suit bien le ministre, devrait être facile, puisqu'il ne devraiut pas y avoir "une grande différence".

Pourtant, les sénateurs ont largement défait le travail de l'Assemblée nationale, revenant sur les avancées obtenues au sujet de l'interopérabilité, légitimant les mesures techniques de protection contre la copie (les DRM), créant une «autorité de régulation» dont le rôle sera de trancher les litiges portant notamment sur l'interopérabilité, obligeant les FAI (fournisseurs d'accès à Internet) à surveiller leurs clients...

Bien du plaisir à la CMP ! Et tant pis pour les autres.

16.6.06

Conseil Supérieur de l'Abhérance

Dans sa décision du 13 juin, publiée le 14 juin, le CSA a décidé ceci :
En conséquence, le Conseil a décidé d'imputer les interventions des onze députés ayant voté la censure au temps de parole de l'opposition parlementaire, conformément au principe de référence adopté en 2000 pour l'appréciation du pluralisme, qui prévoit que l'appartenance à la majorité ou à l'opposition parlementaire s'applique à des personnalités et non à des formations politiques.
Ce qui signifie donc que les 11 députés UDF qui ont voté la censure du gouvernement (dont M. Bayrou lui-même) voient désormais leur temps de parole dans les médias affecté au décompte de l'opposition parlementaire !

Cela ne manque pas de sel, et semble conforme à l'esprit du recul pris avec le gouvernement par le chef de l'UDF.

Cependant, la décision pose problème sur le fond, pour au moins les raisons qui suivent :

1) s'il suffit de voter la censure pour être classé dans l' "opposition", il est évident, par contraposée, que sont classés dans la majorité ceux qui ne voteront pas la censure. Ergo, il suffit maintenant à l'opoosition de ne pas voter la censure pour pouvoir voir leur temps de parole compté dans l'autre camp. De même, il suffirait à quelques députés de la majorité de voter la censure pour ensuite aller déblatérer à longueur de temps sur le compte-temps de l'opposition. Amusant !

2) Poussons le raisonnement du CSA plus loin et imaginons que des députés de la majorité (hypothèse extrêmement farfelue, je vous l'accorde) ne votent pas pour les textes de leur camp. Ne faudrait-il pas alors les compter aussi dans l'opposition ?

On le voit, cette décision est pour le moins curieuse. Le fait que le patron du CSA soit un certain M. Baudis n'a certainement rien à voir avec cette décision hautement politique...

6.6.06

Mme Royal affole les journalistes

La couverture médiatique de la parution du 2ème chapitre du livre en ligne de Mme Royal, sur son site désirs d'avenir, tourne à la caricature.

"Ségolène Royal s’attaque aux 35 heures", nous dit 24 heures.
"Ségolène Royal s’attaque aux 35 heures et au sous-emploi", nous répète Culture Femme.
"Ségolène façon Sarkozy", nous dit-on chez DHNet.

Mais qui a lu ce chapitre 2 pour le résumer à un point de la partie X ?

Voilà le plan de ce chapitre, qu'on peut consulter ici :
I .- Chômage, sous-emploi et précarité : les chiffres du désordre
II.- Déstabilisation des classes moyennes et blues des cadres
III.- La colère des Français et le descenseur social
IV.- Sous les mots d’aujourd’hui, les idées d’avant-hier
V.- Financiarisation de l’économie : de l’intérieur du système, certains tirent le signal d’alarme
VI.- Patrons-voyous : les moutons noirs
VII.- Licenciements boursiers : détruire les emplois pour doper les dividendes
VIII.- Mille-euristes et milliardaires : pauvreté salariée et parachutes dorés
IX.- Délocalisations : la mondialisation-alibi
X.- Santé-sécurité au travail : le retard français
La partie X traite effectivement des 35 heures, pour en dire ceci :
La réduction du temps de travail a été conçue davantage comme un outil de création d’emplois (350.000) que comme l’aboutissement d’une réflexion sur les conditions de travail. Leur contre-partie fut un spectaculaire assouplissement du droit du travail (à condition que des accords négociés l’encadrent) et une flexibilité accrue (annualisation, réduction des délais de prévenance, etc.).
Ou encore ceci :
C’est donc essentiellement au bas de l’échelle des qualifications et des statuts que la flexibilité a été accentuée : chez Michelin, les cadres ont bénéficié de jours de congé supplémentaires et les ouvriers sont venus travailler le samedi…
On le voit, il s'agit donc pour Mme Royal, non pas de "s'attaquer aux 35 heures" ou de faire du Sarkozy, mais seulement de tirer les leçons de la mise en place d'une politique, de faire un bilan et un état des lieux. Exactement ce qui devrait être fait après la mise en place de chaque nouvelle mesure !

Qu'on se comprenne bien : il ne s'agit pas pour moi de faire la promotion de la candidate à la candidature PS. Son ambition m'est indifférente.

Ce que je déplore, c'est qu'une fois encore, le traitement de l'information est parcellaire et cherche à créer le scoop, en montant en épingle une part anecdotique d'un programme politique pour mettre la pagaille dans la politique et vendre encore plus de papier...

De plus, sur le fond, l'état des lieux réalisé par Mme Royal est assez bien vu. Les cadres et les grandes entreprises ont su profiter de la réduction du temps de travail, laissée à la négociation par Mme Aubry. Les syndicats des grandes boîtes ont pu obtenir jusqu'à 23 jours de RTT, quand les petites boîtes sont seulement passées à 35 heures par semaine, en continuant à travailler le temps nécessaire à la réalisation des commandes en cours...

Les cadres, dans leur majorité ont pu négocier une annualisation de leur temps de travail en contrepartie de jours de récupération RTT, ce qui leur permet d'améliorer globalement leur qualité de vie, puisque l'annualisation était déjà leur lot avant les 35 heures !

Les opérateurs, par contre, ont dans l'ensemble négocié leurs RTT contre une flexibilité accrue et une annualisation du temps de travail qui n'était pas la règle pour eux auparavant. Ce qui a conduit, toujours à lal louche, à une dégradation de leur qualité de vie, du fait des horaires imposés, souvent variables, etc.

Il faut évidemment se garder de caricaturer. Impossible de décrire en quelques mots l'ensembles des dispositifs, parfois ingénieux, qui ont été mis en place pour passer à 1600 heures de travail annuel. Je renvoie cependant à cet article de Gérard Filoche, qui en parle bien et qui propose quelques aménagements "de gauche".

Mais il ne faut pas non plus oublier que les négociations des 35 heures s'est faite également au détriment des salaires, qui ont été bloqués pendant plusieurs années dans beaucoup d'entreprises, au prétexte du surcoût des 4 heures perdues par semaine. En oubliant que le passage aux 35 heures a permis, en obtenant une flexibilité accrue, de dégager des marges importantes de productivité...

Pour conclure ce billet, je constate qu'il est sans doute trop compliqué pour certains de prendre le recul nécessaire pour présenter ces quelques idées dans le même papier. Il est beaucoup plus simple de chercher un angle de présentation aguicheur sur des citations extrêmement courtes d'un candidat. Ce type de journalisme me désole, et me renforce dans l'idée que l'information est une chose trop précieuse pour la laisser à des marchands.

2.6.06

Insécurité nucléaire: la preuve de la malhonnêteté intellectuelle de Greenpeace est faite!

Greenpeace France nous apprend qu'un Pagojet a pénétré la zone d'exclusion aérienne de Flamanville. Et Greenpeace nous affirme sans rire que la conséquence de cette action est de demontrer "les insuffisances du système de sécurité prévu par EDF".

Bien. Rions un peu, puis discutons.

Qu'est-ce qu'un Pagojet ? Il s'agit d'une aile volante motorisée, c'est à dire un parapente équipé d'un moteur, comme on peut le voir ici.

Qu'est-ce qu'une zone d'exclusion aérienne ? C'est une zone dans laquelle les avions ne peuvent pénétrer sans autorisation. Des interdiction de survol existent autour de toutes les centrales. Les monomoteurs ne peuvent survoler le site à moins de 300 m d’altitude et les bimoteurs à moins de 1000 m (arrêté du 10 octobre 1957). L'article L 131 3 du code de l'aviation civile indique que :
Le survol de certaines zones du territoire français peut être interdit pour des raisons d'ordre militaire ou de sécurité publique. L'emplacement et l'étendue des zones interdites doivent être spécialement indiqués.
C'est le cas des centrales nucléaires...

Le discours de Greenpeace consiste à dire que si une aile volante est parvenue à pénétrer la zone d'interdiction de survol, cela implique nécessairement qu'un gros porteur pourra le faire aussi facilement. A l'appui, une petite vidéo pour faire bien peur au chaland, montrant le crash d'un gros porteur sur une centrale.

Que dire, sinon que la ficelle est un peu grosse ?

Qu'on cherche à démontrer le manque de sécurité des centrales, notamment vis-à-vis d'un crash suicide de gros porteur, pourquoi pas ? C'est effectivement un évènement qu'on peut redouter suite aux attentats du 11 septembre 2001 sur New-York et Washington.

Mais utiliser le survol par un type suspendu à une voile comme argument est intellectuellement malhonnête. Ces deux évènements sont en effet incomparables :
- un "pagojet" est indécelable et peut s'envoler de très près de la centrale,
- un "pagojet" ne représente aucun risque pour une centrale. Il ne peut se jeter sur la centrale, il ne peut emporter de bombe, il n'est pas une menace.

Au contraire d'un gros porteur qui lui risque en cas de crash non seulement de tuer ses passagers, mais de démolir une bonne partie de la centrale, avec le risque de dispersion de matière radioactive à grande échelle. Mais on peut objecter qu'à la différence du "Pagojet", un gros porteur :
- devra décoller d'un aéroport reconnu, donc loin de Flamanville (dansle cas de l'EPR),
- sera visible sur tous les radars, et sera soumis au contrôle aérien de la zone de la Manche,
- devra répondre du moindre écart par rapport à sa route prévue,
- lancera la procédure d'alerte prévue dans ce cas depuis 2001 s'il est confirmé que cet avion représente une menace

Puis il faut se poser la question de la réalisation d'un tel acte : détourner un avion est devenu plus difficile depuis 2001, allez savoir pourquoi...

Il faut également se demander quelles seront les conséquences d'un tel crash, s'il survenait. PAs de chances, c'est couvert par le secret défense, pour la bonne raison que c'est un secret de défense ! Inutile d'expliquer au public, donc à des agresseurs potentiels, comment attaquer le mieux possible les installations, et comment elles sont défendues. Cela ne constitue pas une rétention d'information abusive.

En conclusion, libre à Greepeace de faire peur, mais un peu de réflexion permet de comprendre rapidement qu'il ne s'agit que de poudre aux yeux. Le risque d'un attentat contre une centrale nucléaire est un sujet à prendre avec sérieux. Il semble que l'Etat et l'ASN le prennent en compte, et mettent en place des moyens pour qu'un tel évènement ne survienne pas. Est-il surprenant que ces moyens de défense ne soient pas révélés au public ?